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XXVII
INTRODUCTION

convertit en histoire ce que, partout ailleurs, on tourne encore en roman. Son objectif est toujours Rome, les Scipion sont ses héros. Alors que surgissent encore, chez les autres peuples, les lourdes et enfantines chroniques, les Novellieri Italiens raillent les miracles des moines, Ricoldo di Montecroce discute de Variis religionibus, et l’affranchissement de l’esprit est tel, chez des personnages comme Frédéric II, Pierre des Vignes, le cardinal Ubaldini, Farinata degli Uberti et son fils, Guido Bonatti, Cavalcante de’ Cavalcanti, que la réaction religieuse peut donner créance à l’existence du livre imaginaire de Tribus impostoribus et accuser tour à tour chacun de ses ennemis d’en être l’auteur.

C’est en remplaçant le formalisme des écoles monastiques par l’aliment assimilable du savoir ancien, que l’Italie a renversé la Scolastique et substitué à ses étroits systèmes l’esprit vivifiant de l’Antiquité. C’est ainsi qu’elle a entraîné l’Occident à sa suite et fait écrouler l’édifice médiéval qui n’était pas lié par un ciment durable, et dont la perpendiculaire, plongeant son sommet dans l’inconsistance des nuées, ne posait pas sur une base assise en des conditions stables. Elle a contribué à changer la constitution sociale, fêlé le moule barbare des castes, établi logiquement deux grandes divisions parmi les hommes, contre lesquelles ne prévaudront pas les aristocraties ni les