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Page:Le Songe de Poliphile - trad. Popelin - tome 1.pdf/276

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marbre, je ne sais si j’aurais eu l’audace de m’en approcher.

Le passage dont j’ai parlé, taillé dans la pierre vive, menait dans un espace central et circulaire où se trouvait un escalier tournant par où l’on montait jusqu’à la cime de la pyramide, sur la plate-forme du cube qui supportait l’obélisque élevé. Ce que j’admirais par-dessus tout, dans ces travaux étonnants, c’était la clarté parfaite qui régnait dans la vis de l’escalier. C’est que l’architecte ingénieux et subtil avait, le plus intelligemment du monde, ménagé, avec une exquise recherche d’intelligence, quelques conduits dissimulés de lumière, qui, selon le cours du soleil, correspondaient directement à la partie basse, moyenne et haute. La partie basse était éclairée par les soupiraux d’en haut, la partie haute par ceux d’en bas qui, par réflexion, l’illuminaient suffisamment. Car l’habile mathématicien avait si bien calculé les règles de la parfaite disposition du bâtiment, selon les trois faces orientale, méridionale et occidentale, qu’à toute heure du jour l’escalier tortueux était éclairé au moyen de ces soupiraux distribués et dispersés symétriquement en divers endroits de la grande pyramide. Sur la façade où était cette tête de Méduse, il y avait un escalier droit et élevé qui se trouvait à la base de l’édifice, du côté droit, et qui était creusé à même le roc, dans l’espace de dix pas compris entre la pyramide et la montagne. J’y montai avec plus de curiosité qu’il n’était permis, peut-être ; étant parvenu, par l’entablement, jusque devant la bouche, je gravis les marches tournantes, atteignant, non sans fatigue et non sans vertige, à une hauteur incroyable. Mes yeux ne pouvaient voir jusqu’en bas, tant les objets qui s’y trouvaient me semblaient effacés par la distance, et je n’osais bouger du milieu de la plate-forme. Autour de l’issue de l’escalier tournant