Étant enfin parvenus à l’ouverture de la magnifique porte, nous la trouvâmes fermée par une merveilleuse et gaie tenture toute tramée d’or et de soie, dont le tissu offrait deux fort belles compositions. La première, en bordure, représentait toute espèce d’instruments de travail. La seconde était une figure dont le visage virginal levé considérait le ciel attentivement. La beauté en était telle, que je sentais que nul pinceau — si ce n’est celui de l’illustre Apelle — n’eût jamais pu y atteindre.
Là mes éloquentes, mes très-belles et charmantes compagnes alignèrent avec bonté leur jambe droite avec la mienne[1], dans l’intention de m’introduire, me disant avec bienveillance : « Poliphile, tel est l’ordre qu’il convient d’observer pour parvenir en la présence vénérable de notre Reine et paraître devant Sa Majesté sublime. Il n’est permis à personne d’outre-passer cette principale et première tapisserie, sans être reçu tout d’abord par une honnête et vigilante demoiselle gardienne appelée Cynosie[2]. » Or, celle-ci ayant entendu que nous arrivions, se présenta tout aussitôt, et, poliment, souleva la portière. Nous entrâmes. Là se trouvait un espace interposé et fermé par une autre tapisserie étalant une composition d’un art parfait, d’un coloris varié, qui représentait des plantes et des animaux exécutés en broderie rare. En cet endroit, une dame s’enquérant de nous et nommée Indalomena[3], se présenta. Puis, ayant retendu son rideau, elle nous introduisit. Un nouvel espace se présenta entre la