Page:Le Sylphe - Poésies des poètes du Dauphiné, tome 1, 1887.djvu/65

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POÉSIES DES POÈTES DU DAUPHINE J'aime à passer le mien sur les cimes alpestres, Dans le creux d'un vallon, sous l'ombrage d'un parc, Où l'Amour, à mon choix, bande ou détend son arc. Peu me suffit; et quand au travail je me livre, J'en tire sans effort ce qu'il me faut pour vivre... Sois sans inquiétude, ô grave Ignarius! Ma main solidement fixée au radius, Sert gaîment mon bon cœur et ma mauvaise tête : Un gain pénible et lent est d'autant plus honnête. Ma démence t'ennuit? J'ai lu je ne sais où : « Pour être vraiment sage, il faut être un peu fou. » C'est pourquoi je divague. A quoi sert la sagesse Si pour escorte elle a l'orgueil ou la bassesse ? J'ai parcouru le monde, et j'ai vu bien des gens Des plus favorisés qui manquaient de bon sens ; Et j'en vois chaque jour, apparemment stupides, Qui dans l'occasion sont les plus intrépides. Crois-tu donc bien sensé de prendre un homme au cou, Et de rire sous cape en le traitant de fou ? Les sages sont des sots; les fous font des merveilles ! O sages! montrez-nous les beaux fruits de vos veilles. Vous êtes nés rampants, messieurs, vous le savez : Le vertige vous prend si vous vous élevez, Et vous tombez à plat sur vos ailes de dinde... Le fou monte Pégase et vole jusqu'au Pinde, Séjour inaccessible à vos étroits cerveaux, Mais où l'œil du fou voit mille horizons nouveaux. Cela dit, je vous laisse où le Destin vous cloue : Si vous vous y plaisez demeurez dans la boue. . . Moi j'aime à me hisser dans l'espace et l'azur Où je'nage en des Mots de lumière et d'air pur. Août 1884. Hippolyte BAFFERT.