Pareillement qu’arrive-t’-il de ces vaines, odieuses
et injurieuses distinctions des Familles, que les hommes
font mal à propos entr’eux, comme s’ils étoient
de différentes espèces et de différente nature, ou qu’ils
fussent d’une meilleure et d’une plus pure origine les
uns que les autres, qu’arrive-t’-il de-là ? Que ceux,
qui sont de diverses familles, se méprisent et se dédaignent
les uns les autres, sous prétexte que les
uns se croïent être de meilleure ou de plus honorable
famille que les autres. Il arrive de-là qu’ils se
méprisent, qu’ils se déshonorent, et qu’ils se diffament
les uns les autres, et qu’ils ne veulent pas même
se prendre les uns les autres en mariage, sous prétexte,
qu’il y auroit quelque chose à redire à la famille
de ceux-ci ou à la famille de ceux-là, et ce
quelque chose, qui est à redire, n’est cependant
ordinairement fondé que sur de vains bruits sourds et
confus et sur de fausses imaginations et opinions, que
les hommes se mettent en tête, qu’il y a des races
de sorciers et de sorcières, c’est-ce qu’ils s’imaginent
sur des riens, sur des bagatelles, et sur de simples
ouï-dire et sur de mauvais discours, que des gens
ignorans et passionnés ou mal intentionés font
les uns contre les autres, à quoi si on vouloit toujours
s’arrêter, il n’y auroit peut-être point de famille, qui
pouroit s’assurer d’être tout-à-fait exemte de ces pré-