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Page:Le Tombeau de Théophile Gautier, 1873.djvu/123

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LA PIERRE DU TOMBEAU





Pour ce néant qui dort en cette nuit de pierre,
L’univers était fait de forme et de couleur.
Pour lui tout, rêve ou chose, amour, joie ou douleur,
Était un mouvement rehaussé de lumière.

Comme une aigue marine il enchâssait un pleur.
Son pouce modelait l’idée ou la matière ;
Son œil par le menu l’embrassait tout entière ;
Et le fini du trait n’excluait pas l’ampleur.

Sous un couchant terni par la honte et le doute.
Impassible, il marcha, tant qu’il put sur la route
Voir le reflet lointain d’un lever radieux.

L’aube nouvelle est loin ; il meurt quand la nuit tombe ;
Il s’en va retrouver le soleil dans la tombe,
Pareil à ces anciens que la mort faisait dieux.

ANDRÉ LEFÈVRE.