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Page:Le Tour du monde, nouvelle série - 06.djvu/580

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Unis du Canada ; à partir de ce moment, le Saint-Laurent coule entièrement dans le Dominion. Le fleuve s’élargit ensuite pour former le lac Saint-François ; cette belle nappe d’eau avec sa bordure de fermes et de bois émaillés de tentes d’excursionnistes et de villas, ses îlots éparpillés et son horizon borné par les collines lointaines de Châteaugay — un éperon des Adirondacks — forme un ensemble particulièrement attrayant. Le steamer passe aussitôt après sous le magnifique pont de fer du Canada-Atlantic Railway qui est long d’environ un mille et demi ; nous franchissons ensuite les rapides du Coteau et longeons, environ sept milles plus bas, une petite île dont le feuillage épais traîne dans le courant qui se précipite vers les turbulents rapides du Cèdre ; leur saut est assez émotionnant : le navire semble se préparer à sombrer, puis soudain il se redresse comme pour : parer le coup, que veulent lui porter les récifs auxquels il finit par échapper. Mais après avoir évité Charybde, il tombe dans Scylla représenté par le Rocher Fendu (Split Rock) qui passe pour être le plus sournois de tous ces cailloux ; on ne peut s’empêcher de frémir en voyant le vaisseau s’en approcher : au dernier moment, un coup de barre exercé l’évite, nous virons de bord et, de nouveau, glissons sains et saufs. C’est maintenant le tour des Cascades, la dernière de cette série de rapides ; elles sont remarquables par leurs vagues écumantes qui font rouler et tanguer le navire comme s’il était en pleine mer. Ce groupe de quatre rapides se suivant à peu de distance les uns des autres, forme une descente de 82 pieds 1/2 qui s’étend sur une longueur de 120 milles. Au-dessous des Cascades, un nouvel épanouissement du fleuve prend le nom de lac Saint-Louis ; presque à sa tête, la rivière Ottawa se mêle au Saint-Laurent, et les eaux sombres de ce courant du Nord vont s’égarer dans le grand lac profond qu’enveloppe un très beau décor : les monts de Châteaugay dressent derrière les arbres leurs têtes imposantes, cependant que des nuages traînent leurs ombres sur les flots changeants et que les silhouettes confuses du Mont-Royal et de Belœil s’entrevoient déjà à l’horizon.

LES MILLE ÎLES. — LIGNE DE LA COMPAGNIE DE NAVIGATION « RICHELIEU ET ONTARIO » — DESSIN DE BOUDIER.

À partir du lac Saint-Louis, la rive, à notre gauche en descendant, est celle de l’île de Montréal et tout le long s’égrènent les nombreuses villas des citadins qui viennent y passer les mois d’été. À la sortie du lac, nous côtoyons la petite ville de Lachine, qui doit son nom à ce qu’en cet endroit les premiers colons crurent avoir découvert une route qui les eût conduits en Chine ; en face, sur l’autre berge, nous revoyons le village