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LA VILLE DE SAINT-PIERRE AVANT LA CATASTROPHE. — DESSIN DE BOUDIER.


LA CATASTROPHE DE LA MARTINIQUE

I. — Avant la Destruction de Saint-Pierre.


UNE MARTINIQUAISE. D’APRÈS UNE PHOTOGRAPHIE.


De toutes les villes de nos colonies, Saint-Pierre de la Martinique passait pour l’une des plus agréables. Elle s’étendait en demi-cercle le long de la mer, adossée à de petites collines verdoyantes, qui formaient, autour d’elle, un cadre ravissant. Ses rues, larges et bien tracées, les nombreux jardins qui entouraient secs maisons, faisaient d’elle une cité riante.

Administrativement placée au second rang, puisque Fort-de-France est le chef-lieu de l’île et la résidence du Gouverneur, Saint-Pierre était cependant le centre le plus important de la colonie. Sa rade foraine, exposée à la mer, n’offrait certes pas aux navires une sécurité très grande ; mais les habitants s’étaient ingéniés à multiplier les moyens de ravitaillement et les commodités des opérations de chargement ou de déchargement, si bien que Saint-Pierre tenait la tête du mouvement commercial. Malgré la crise qui a frappé depuis quelques années l’industrie sucrière, cette jolie ville était encore fort animée, avec ses 30 000 habitants, avec les quais mouvementés de son port, avec les tramways électriques circulant dans ses rues. À débarquer à Saint-Pierre, on éprouvait l’impression que la vie devait y être bonne. Et, de fait, tous ceux qui y avaient vécu en conservaient le souvenir le plus charmant et le plus durable.

Quelques minutes ont suffi pour anéantir cette ville et pour endormir du dernier sommeil sa population entière. Un cataclysme, sans précédent dans l’histoire, a consommé, le 8 mai dernier, l’anéantissement total de Saint-Pierre et de ses environs immédiats…

L’origine volcanique de la Martinique l’expose malheureusement à des sinistres fréquents et terribles. On sait que cette île est traversée, dans toute sa longueur, du nord-ouest au sud-est, par une chaîne de hautes montagnes à nombreux reliefs, entrecoupées de vallées et de gorges étroites. La plus élevée de ces montagnes, qu’on appelle « mornes » aux Antilles, est la montagne Pelée, haute de 1350 mètres, qui est franchement volcanique et dont la dernière éruption remonte au mois d’août 1851.