Page:Le Tour du monde, nouvelle série - 10.djvu/153

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

charbon. Le charbon coréen est assez bon, bien qu’il brûle un peu vite, et doit développer, comme le japonais, quatre à cinq mille calories par kilogramme ; c’est le seul dont on se serve en Corée.

Le poste d’inspecteur des mines de l’Empire a été confié à un ancien fonctionnaire d’Indo-Chine qui joint à une grande expérience des affaires une amabilité peu commune. Il s’est acquis la confiance impériale et s’efforcera de développer les intérêts français ; les ingénieurs de l’École centrale, désireux d’employer leur activité et leur science au dehors, peuvent s’adresser à lui pour obtenir des renseignements complets.

Les voies et communications laissaient fort à désirer, mais elles ne tarderont pas à être améliorées. Un chemin de fer, construit par les Américains et racheté par les Japonais, relie Tchemoulpo à Séoul, et un tramway électrique circule dans les rues de la capitale ; les Russes ont le projet d’établir une ligne du côté de Masampo, et une Société française avait la concession d’un chemin de fer entre Séoul et la frontière septentrionale. Il paraît que cette dernière concession aurait été abandonnée et que le Gouvernement coréen la reprendrait pour son propre compte ; néanmoins les études sont faites en ce moment par une mission d’ingénieurs français ; bientôt les travaux de construction seront commencés, l’exploitation sera confiée à nos compatriotes, et tout le matériel doit être acheté en France.

Enfin, nos intérêts économiques se sont développés dans cette dernière année, parallèlement à notre influence morale.

UN FONCTIONNAIRE CORÉEN ET SA FEMME. — D’APRÈS UNE PHOTOGRAPHIE.

J’ai rencontré, à Nagasaki, un ingénieur français, M. Cazalis, envoyé par un syndicat puissant pour examiner s’il y avait quelque entreprise à créer dans le pays. Arrivé avec des capitaux importants, M. Cazalis s’aperçut vite que pour obtenir des avantages matériels, des concessions, des exploitations minières, il fallait non demander de l’argent à l’empereur de Corée, mais lui en prêter en exigeant des gages. Notre compatriote obtint ainsi rapidement le droit de créer une banque d’État, de frapper la monnaie du pays et surtout d’exploiter une mine d’or destinée à donner des bénéfices importants. Le Gouvernement japonais s’émut de notre initiative industrielle et, appuyé par l’Angleterre, voulut agir par menaces sur les différents ministres coréens. Pendant près d’un mois, les pourparlers engagés furent soumis à des alternatives d’échec et de réussite ; les journaux d’Extrême-Orient avaient leurs colonnes remplies par les péripéties de cet incident diplomatique et personne ne pouvait préjuger l’issue des événements.

Enfin, lors de mon dernier passage à Hong-kong, j’ai pu rencontrer M. Cazalis qui m’apprit que tout s’était terminé au gré de ses désirs, et qu’avec l’appui du chargé d’affaires de France, ses différentes combinaisons financières et industrielles avaient été adoptées ; il venait en France pour rétablir sa santé et faire entrer ses projets dans une voie d’exécution.

Nous avons donc pu nous convaincre, dans l’audience à laquelle nous assistâmes, que la qualité de Français était hautement appréciée par l’empereur et par ceux qui gouvernent en son nom. Nous fûmes reçus, à sept heures du soir, car, ainsi que je l’ai déjà rappelé, l’empereur ne dort plus que le jour et reste éveillé la nuit, forçant les ministres et les familiers du palais à s’occuper