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ardoises, des machines agricoles. On y fabrique des caisses pour conserves alimentaires, du tannin, du rouge à polir. Enfin, c’est un entrepôt pour le vin, l’eau-de-vie, la cire, le sel, le miel. C’est à sa position sur la Vilaine que Redon doit cette importance, peu visible tout d’abord, mais que l’on finit bien par discerner à travers les allées et venues des quais.



II. — Le Pays de Vannes.


La presqu’île de Rhuis. — Beaux jardins. — Saint-Gildas. — Un saut de cheval. — Une lettre d’Abailard à Héloïse. — Sarzeau et la maison de Le Sage. — La mer du Morbihan. — Autant d’îles que de jours dans l’année. — L’île d’Arz. — Gavr’inis et son tumulus. — L’île aux Moines. — Les jeunes filles attendent les marins partis pour toujours. — Le chant du vieux tailleur. — Le château de Sucinio. — Vannes. — La vieille ville et la ville neuve. — Le dédale des rues. — Vincent Ferrier. — Les innocents. — Rochefort-en-Terre. — Le décor et les habitants. — Méditation sur la lande de Lanvaux. — Nécessité des villes. — La tour d’Elven, décor d’Octave Feuillet.


La presqu’île de Rhuis sépare de l’Océan la mer du Morbihan ; elle s’étend sur une longueur d’environ 25 kilomètres, une largeur qui atteint 10 kilomètres, et s’achève en pointe près d’Arzon, par des falaises de gneiss et de pierre schisteuse. Ici, la mer calme ses fureurs. Les vagues, amorties par un chapelet d’îlots et par la presqu’île de Quiberon, lèchent doucement le granit, et cette côte est une des moins dangereuses de la Bretagne. Charmante contrée où les hivers sont d’une bénignité extraordinaire. Les jardins sont garnis d’arbres que nous ne connaissons guère que pour les avoir vus dans les serres, les parcs sont ombragés par des chênes verts, fleuris de grenadiers, de lauriers, de camélias, d’aloès, de fuchsias, d’hortensias, de cactus ; les vignes sont garanties des ardeurs du soleil par des mûriers, des figuiers, on aperçoit partout des plantes du nord de l’Afrique.

LE SOIR, PRESQU’ÎLE DE RHUIS.

À quelques centaines de mètres de la côte, c’est le bourg de Saint-Gildas, dont la fondation remonte au vie siècle, Il y a là une très vieille église dans laquelle sont épars des fragments de sculptures du xvie siècle, des stalles, des châsses, des reliques de saint Gildas, des sépultures de saints, des tombeaux où furent enfermées les cendres de plusieurs princes de Bretagne. On tombe en plein pays de légendes et d’exploits de thaumaturges : sur la côte, dans le voisinage des cabines, jaillit une fontaine miraculeuse, et les bons yeux peuvent voir, tout à côté, la trace marquée par le sabot du cheval que montait saint Gildas, lorsqu’il franchit d’un bond l’espace jusqu’à l’île d’Houat. Mais le vrai et grand souvenir, c’est l’abbaye que gouverna Abailard lorsqu’il crut trouver la paix dans ce pays délicieux, mais de laquelle il dut s’enfuir, poursuivi par l’ignorance des hommes.