AU PÔLE SUD[1]
II. — LA CONSTRUCTION DE FRAMHEIM
e 1er janvier à trois heures du matin, l’officier de quart me
réveille. Le premier iceberg est en vue ! Immédiatement je
monte sur le pont saluer cette sentinelle avancée de l’armée
que nous allons combattre. Elle apparaît au loin comme un
point brillant sous les pâles rayons du soleil levant. C’est un
grand bloc, ayant la forme tabulaire, caractéristique des icebergs
antarctiques. En général, la vue de ces glaçons monstrueux
n’éveille guère la joie dans le cœur du marin ; à nous, au contraire,
elle cause une vive satisfaction. Cet iceberg n’annonce-t-il
pas l’approche de la banquise ? Grande est notre hâte de la
découvrir. La navigation au milieu de la glace apportera un peu
de variété dans la vie monotone que nous menons
depuis cinq mois, et dont nous commençons à être fatigués.
Courir quelques minutes sur un ice-floe nous
semble la plus enviable des distractions. En outre, sur
la banquise, nous trouverons des phoques et pourrons
nous régaler tous, bêtes et gens.
Dans l’après-midi, et dans la nuit suivante, le nombre des icebergs augmente. Heureusement, le jour continu permet de se garer facilement de ces dangereux voisins. Nous n’aurions pu souhaiter meilleur temps : ciel clair et légère brise favorable.
Le 2 janvier, à huit heures du soir, le cercle antarctique est franchi ; quelques heures plus tard, l’homme de veille signale la banquise. Bientôt la mer tombe ; le navire ne bouge plus. Après avoir chaloupé
- ↑ Suite. Voyez page 25.