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Partis le 10 février, c’est le 14 que nous arrivâmes, après avoir parcouru 141 kilomètres, au 80° de latitude, où nous commençons la construction du dépôt. Il est bâti très solidement et on lui donne une hauteur de 4 mètres. Tous les 15 kilomètres nous avons planté un bambou surmonté d’un pavillon pour jalonner la route. Une fois le dépôt terminé, nous prenons place sur les traîneaux et en route pour Framheim. Un voyage singulièrement agréable, une vraie partie de plaisir que de se faire ainsi voiturer. Maintenant, notre seule occupation est de jalonner la piste avec nos morues. Tous les 500 mètres, un poisson est enfoncé dans la neige. Ce mode de bornage inédit donna d’excellents résultats, les poissons enfouis se distinguant nettement sur la nappe blanche ; en plusieurs circonstances, il nous remit dans le droit chemin, et au retour de la seconde expédition il fut particulièrement apprécié par nos chiens affamés.

Aujourd’hui, étape de 70 kilomètres ! Nous ne nous couchons pas avant une heure du matin ; le lendemain, dès quatre heures, nous sommes debout, et, à sept heures et demie, en route. Quatorze heures plus tard, nous étions de retour à Framheim, après une trotte de 100 kilomètres ! En marchant à cette vitesse, nous ne nous proposions nullement d’établir un record sur la Barrière, nous désirions simplement rentrer avant le départ du Fram, afin de serrer une fois de plus la main à nos chers camarades. Notre diligence fut inutile : le navire était parti quelques heures avant notre retour. Maintenant, combien la rade vide nous semble triste ! Devant ce paysage silencieux, soudain un voile de mélancolie nous enveloppe.

LINDSTRÖM SUR SES SKIS.

Après cette reconnaissance, il nous est permis d’envisager l’avenir avec confiance. Nous connaissons le terrain de nos futures opérations, et avons expérimenté le moyen de locomotion que nous avons adopté. L’un et l’autre répondent à nos désirs. J’ai toujours pensé que les chiens sont d’incomparables animaux de trait ; après ces dernières étapes, mon admiration pour eux devient de l’enthousiasme.

En notre absence, nos camarades demeurés à Framheim ont accompli des prodiges. La maison a pris un tout autre aspect, avec sa véranda. Cette construction occupe toute la façade ouest, soit 3 m. 90, et mesure environ 3 mètres de large. Éclairée par deux fenêtres, elle est très agréable. Tout autour de la baraque, nos amis ont creusé un passage, large de 1 m. 50, qu’ils ont couvert, en prolongeant le toit jusqu’à