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Il revient chaque année célébrer la messe aux Aliscamps le jour de la Toussaint. Le cimetière, devenu chrétien, passait pour être préservé de toute atteinte diabolique, et le séjour de ce lieu de repos était fort recherché. Des mémoires du xiiie siècle racontent que les riverains du Rhône laissaient descendre leurs morts au fil de l’eau, après avoir disposé dans un coffret scellé au cercueil le droit de mortelage ou prix des funérailles. Les mariniers se signaient quand passait un cercueil ; nul n’eût osé porter une main sacrilège sur les morts des Aliscamps. Arrivés à la hauteur d’Arles, les corps flottants s’arrêtaient comme par miracle. Les moines de Saint-Honorat les recueillaient et les inhumaient suivant leur condition. De la célèbre nécropole, où l’on comptait plus de trente églises ou chapelles, il ne reste que l’allée des Aliscamps bordée de sarcophages de pierre, des chapelles Saint-Accurse et des Porcelets ou Notre-Dame de la Miséricorde, et aboutissant à l’église Saint-Honorat. On prétend que cette église, où saint Honorat fut inhumé en 429, aurait été fondée par saint Trophime et agrandie par Charlemagne. L’édifice, dont certaines parties sont antérieures au xiie siècle, contient un grand nombre de chapelles seigneuriales et des sarcophages mérovingiens. Les Aliscamps, « ces champs élysées » d’Arles, mutilés et morcelés, ont beaucoup perdu de leur intérêt. Néanmoins la promenade reste impressionnante lorsqu’au déclin du jour, sous les peupliers frissonnants, on évoque le souvenir des morts illustres qui y ont dormi leur dernier sommeil.

ARLES. PORTAIL DE SAINT TROPHIME (page 265).
ARLES. LE THÉÂTRE ROMAIN, AVEC SES DEUX COLONNES EN MARBRE (page 264).

Nombreux sont, d’ailleurs, les monuments de l’antique capitale du royaume d’Arles qui n’ont pas résisté aux atteintes du temps ou des hommes. La Madeleine est occupée par une écurie et un grenier. L’entreprise des pompes funèbres a installé ses ateliers dans l’église Saint-Blaise, curieuse pour les archéologues, où dès le xiiie siècle les religieuses de Saint-Césaire célébraient leurs offices. L’ancien couvent des Dominicains a été en partie transformé en usine des eaux de la ville ; on y visite encore les ruines de l’église, la chapelle du Saint-Sépulcre et la chapelle des Morts, ornée d’une frise de têtes de morts sur des écussons. L’ancien Palais de la Commune n’est plus représenté que par quelques pans de mur attenant à l’Hôtel de Ville, et par un banc de pierre élevé au-dessus de trois degrés, sur lequel les juges exerçaient, dit-on, leur office. Du