Page:Le Tour du monde - 05.djvu/368

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tellement maltraitées, elles ont été tellement envahies et défigurées par la végétation perfide des tropiques, qui recouvre ses propres dégradations de son manteau de fleurs, qu’il n’est pas facile de distinguer, au premier abord, la forme primitive de ces monuments. La ressemblance de ces masses énormes avec les tumuli de l’Amérique du nord a fait croire à quelques personnes qu’elles n’étaient que des éminences naturelles, auxquelles la main de l’homme avait donné une forme régulière, et qu’elle avait ensuite ornées de terrasses et de temples, dont les ruines couvrent encore leurs flancs.

D’autres, ne voyant pas d’élévations semblables dans la vaste plaine où elles se trouvent, en ont conclu, avec plus de vraisemblance, qu’elles étaient d’une construction entièrement artificielle.

Autour de ces pyramides principales s’élèvent un grand nombre de monuments du même genre, mais de moindre dimension, et dont bien peu dépassent dix mètres en hauteur. La tradition locale veut qu’ils aient été dédiés aux étoiles et qu’ils aient servi de tombeaux aux grands chefs des anciennes peuplades. La plaine qu’ils dominent s’appelait Micoatl ou chemin des morts. Souvent encore, l’humble laboureur d’aujourd’hui, en retournant la terre pour lui confier la semence de la moisson prochaine, met à jour des pointes de flèches et des lances d’obsidienne, qui attestent le caractère belliqueux des anciens habitants du pays.

Ruines de Tlamanalco (voy. p. 365). — Dessin de Catenacci d’après une photographie de M. D. Charnay.

Le voyageur qui gravit un sommet de la pyramide du Soleil est bien dédommagé de sa fatigue par la vue magnifique qui se déroule devant lui : — vers le sud-est, se dressent les monts de Tlascala, entourés de leurs vertes plantations et de champs cultivés, au milieu desquels on distingue un petit village, jadis fière capitale de cette république ; un peu plus au sud, l’œil traverse les belles plaines qui s’étendent autour de Puebla de los Angeles ; loin dans l’ouest, c’est la vallée de Mexico, qui s’étale comme une carte, avec ses lacs rapetissés, sa noble capitale, sortie plus glorieuse de ses ruines, et ses montagnes accidentées, qui l’entourent de leur sombre rideau comme au temps de Montézuma.

D. Charnay.

Nota. Les dessins originaux de deux planches reproduites dans la livraison 23, pages 293 et 304, ont été par erreur attribués à M. Dauzats ; ils sont de notre collaborateur, M. Blanchard.