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qu’il est d’habitude de le faire dans les temples bouddhistes ; deux figures en posture d’adoration soutiennent cette tige ; les bras sont brisés ; ils devaient reposer sur l’abdomen. La statue est plongée dans une profonde méditation. Brahma et Vishnou se distinguent encore sur ce tableau, où l’on voit un animal que l’on prend pour un cheval ; il porte une selle semblable aux selles européennes, et rappelle sans doute le sacrifice de l’Ekiam.

Les chapelles qui donnent dans la cour ont aussi des parois sculptées. La chapelle de l’est contient une table plus petite que celle qui est dans la chapelle du milieu, qui est de même traversée par une pierre dure ; un serpent fait le tour de cet autel ; sa bouche béante est tournée vers l’est, de façon à servir d’écoulement aux libations.

Les dévots à Siva disent que cette chapelle reçoit les eaux du Gange le jour de la fête de Siva. Deux lions qui supportaient anciennement le trône de Siva en ont été enlevés et ornent aujourd’hui l’entrée de la grotte de l’est, que l’on appelle « la cour des Lions. »

La grotte de l’ouest est plus profonde que celle de l’est ; une galerie supportée par des piliers abrite un grand nombre de personnages qui ornent les parois extérieures de cette chapelle, et sont distribués par groupes à droite et à gauche de la porte d’entrée : les poses de ces statues sont placides et semblent représenter des Mounis en méditation. Elle contient une table semblable à celle des autres chapelles ; la pierre y est renversée.

L’ensemble des sculptures colossales d’Éléphanta, dont quelques-unes ont cinq mètres et plus de hauteur, et dont la saillie est telle qu’elles sont souvent presque entièrement détachées de la roche, représente une espèce de panthéisme, où tous les règnes de la nature semblent se confondre pour arriver, par divers évolutions, à des degrés supérieurs, jusqu’à ce qu’ils soient absorbés en Dieu, dont ils ont issus.

Grande grotte, à Éléphanta. — Dessin de Thérond d’après l’album de M. É. Fleuriot de Langle.

Les plus curieuses excavations que l’on rencontre sur l’île de Salsette sont celles de Kennery. On y a pratiqué un grand nombre de fouilles. On a trouvé sous les dagobas (dômes isolés) des empreintes de sceaux représentant Bouddha. Sur l’exergue de ces sceaux on lit plusieurs phrases du rituel bouddhique qui ne laissent aucun doute sur l’origine des dagobas. Les inscriptions qu’on a pu lire s’espacent depuis 150 avant Jésus-Christ jusqu’à l’an 1400. Pendant ce long laps de temps et à des époques diverses, plusieurs de ces grottes ont servi de lieu de sépulture à des personnes de différents cultes ; les dernières inscriptions sont écrites en persan et en arabe, et se rapportent au culte musulman. Il sortira pour l’histoire de l’Inde une grande lumière du déchiffrement de toutes ces inscriptions. Ou a déjà pu constater des synchronismes entre les rois grecs, les successeurs d’Alexandre et la dynastie indienne. Les fouilles que l’on fait dans les topes bouddhiques mettent à découvert des monnaies macédoniennes qui contrôlent et corroborent les divers synchronismes de ces inscriptions.

Le contre-amiral vicomte Fleuriot de Langle.