qui traverse la presqu’île. Devant nous du sable à perte de vue. À peine quelques genêts sauvages. Ces plantes poussent ordinairement dans les ouadis ou wadis, qui sont les lits où se réunissent les eaux pluviales. Par extension on donne ce nom aux vallées.
Nous nous arrêtons dans un de ces wadis pour déjeuner ; mais un vent léger soulève la fine fleur du sable, et saupoudre nos aliments de telle sorte que nous ne pouvons achever notre repas.
À quatre heures nous arrivons à Wadi-Sadr. Le lieu n’a rien de séduisant ni de pittoresque. On a peine à se figurer une pareille aridité. Cependant il faut que les chameaux n’en jugent pas de-même, car ils se dispersent, aussitôt qu’ils sont déchargés, et paraissent brouter quelque chose d’invisible pour nous. C’est dans cette vallée que nous piquons notre tente et dînons.
La nuit venue, nous jouissons d’un spectacle magnifique qui nous fait oublier le peu de charme du paysage au grand jour. La lune est dans son plein et plane majestueusement au-dessus de nos têtes. Elle luit dans un ciel d’un bleu mat et d’une coloration profonde, inconnue à nos climats. On dirait qu’il a neigé autour de nous, tant la lumière, qui tombe du ciel, est éclatante sur le sable blanc. La ligne d’horizon s’enlève en vigueur sur un fond d’opale. Il nous semble que de pareilles nuits doivent être rares même en Orient. Malgré notre grande fatigue, nous restons longtemps à considérer ces effets merveilleux.
Vraiment notre système de locomotion est tout ce qu’on peut inventer de plus incommode : le pittoresque du chameau n’est bon qu’à voir. Les Arabes ajoutent encore au déplaisir de l’allure du chameau en fabriquant des selles qui pourraient passer pour de petits instruments de supplice. Il ne nous a pas fallu moins de quatre ou cinq jours pour inventer et composer un certain échafaudage de coussins, de matelas et de couvertures qui nous aide du moins à supporter les cahots de nos montures.
21 février. — Partis de Wadi-Sadr à huit heures. Le désert n’est pas toujours gracieux ; mais les jeux étonnants de la lumière dans ces solitudes de sable sont pour nous un sujet continuel d’intérêt. Cela ne ressemble à rien de ce que l’on voit en Europe.
Nous passons à quatre heures à Marah, ou les Hébreux commencèrent à murmurer contre Moïse parce que les eaux étaient amères.
Nous poussons jusqu’à Wadi-Garandel, ou le désert s’humanise un peu. C’est le lieu mentionné dans l’Exode