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dix minutes, le petit bras du golfe où les Hébreux ont passé à pied sec.

L’eau est maintenant si basse que les chameaux en ont au plus jusqu’au ventre. C’est là que le Pharaon et son armée ont été engloutis.

On ne peut juger aujourd’hui de ce qu’était la mer Rouge en ces temps lointains. Elle s’étendait probablement jusqu’aux lacs amers : les sables du désert ont comblé le lit de la mer et refoulé les eaux.

Nous attendons nos gens à la Quarantaine. Il est midi quand nous montons sur nos dromadaires. Notre caravane se compose de huit chameaux, trois dromadaires, huit Bédouins, un cuisinier, et notre drogman Ali. Rien de plus modeste assurément : mais nous ne sommes que deux.

À trois heures nous atteignons les Fontaines de Moïse (Aïn-Mouça), dont nous cherchons et ne voyons aucune mention dans l’exode. Quelques petits jardins, enclos de barrières en palmier, avec une habitation en planches, forment dans ce lieu une espèce d’oasis où les bourgeois de Suez viennent se livrer au plaisir de la villégiature. Ce n’est ni Meudon, ni Auteuil, ni Richmond, mais il y a là de l’eau, et partant un peu de fraîcheur et d’ombrage. Je ne pense pas sans un profond sentiment de pitié que j’ai vu à Suez des gens qui ne savaient pas ce que c’est qu’un brin d’herbe, encore moins un arbre.

Première nuit passée sous la tente. Nous dormons à merveille, et d’autant mieux que cette petite course sur nos montures de désert nous a un peu fatigués.

20 février. — Levé de très-bonne heure ; mais nos Bédouins ont encore l’air de vouloir prolonger leur nuit jusqu’au milieu du jour. Comme ils n’ont ni l’idée ni la mesure du temps, ils ne connaissent que le présent et ne se hâtent jamais de rien faire.

La route est monotone. À droite la mer Rouge, à gauche le Djébel-el-Tih, longue chaîne de montagnes