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Village à Nossi-be. — Dessin de E. de Bérard.



MADAGASCAR À VOL D’OISEAU,

PAR M. DÉSIRÉ CHARNAY[1].
1862. — TEXTE ET DESSINS INÉDITS.


VI (suite.)


Sainte-Marie. — La colonie. — Le cap d’Ambre. — Nossi-Mitsiou. — Nossi-be. — Elsville. — Passandava. — Bavatoubé. — M. Darvoy. — Bombetok. — Moheli. — Ramanateka. — La reine de Moheli. — Retour à la Réunion.

Le 1er octobre, à cinq heures du soir, nous quittions Tamatave, nous dirigeant vers Sainte-Marie, que nous aperçûmes au lever du jour. Située à vingt-cinq lieues dans le Nord, l’île Sainte-Marie s’étend à l’est de Madagascar, sur une longueur de quarante-huit kilomètres ; comme largeur moyenne, elle n’en a que deux ou trois.

Nous doublâmes d’abord l’île des Nattes ; deux heures après, nous passions devant l’île aux Baleiniers pour jeter l’ancre à deux cents mètres environ de l’îlot Madame, sur lequel se trouve établi le gouvernement de notre petite colonie.

Vu de la mer, le panorama de Sainte-Marie est ravissant. C’est d’abord l’îlot Madame, qui défend la baie ; l’île aux Forbans, dans le fond ; en face, l’église avec son clocher ; une allée de manguiers centenaires sous lesquels s’abrite la maison des Jésuites, et, tout le long de la côte, sur la gauche, les maisons éparses des employés, le village malgache d’Amboudifoutch et la magnifique promenade longeant le rivage que vient lécher une mer toujours tranquille.

Ce beau paysage n’est malheureusement qu’un trompe-l’œil ; car au delà, dans l’intérieur, tout est désert, aride, dénudé. L’île est malsaine et stérile, sauf quelques points ; les colons y sont rares, et les membres du gouvernement n’ont autre chose à faire qu’à s’administrer entre eux.

Le gouverneur cependant est un homme remarquable à tous égards et déploie, pour la prospérité de son petit royaume, une activité prodigieuse. Nulle part, à Mayotte pas plus qu’à Nossi-be, nous n’avons vu tant de mouvement et tant d’efforts ; chantiers de construction, assainissement de l’île, port en voie de création, jetées, etc., tout marche à la fois ; mais l’on se demande quels sont le but et l’utilité de tous ces travaux. Sans la possession de Madagascar, Sainte-Marie n’est qu’un point de relâche pour nos vaisseaux de la côte, et l’abandon de l’île nous paraît probable dans un temps plus ou moins éloigné. Avec l’occupation de la grande terre, Sainte-Marie deviendrait au contraire le point le plus important de Madagascar ; ce serait alors l’entrepôt général des marchandises importées et exportées, un port de relâche et de radoub, un refuge sur pour nos vaisseaux, une forteresse facile à défendre.

  1. Suite et fin. — Voy. pages 193 et 209.