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sion rendue plus fatigante encore par l’ardeur d’un soleil brûlant et par le calme complet de l’atmosphère, nous abandonnâmes sans regret ce triste marécage. Mon compagnon de route en rapportait un violent accès de fièvre et moi un peu de désenchantement. Je ne saurais en effet partager avec M. du Chaillu l’espérance de voir un jour cette plaine vaseuse se transformer en rizières, et des navires à vapeur parcourir des eaux qui doivent être effroyablement malsaines.

Cette courte exploration terminait notre voyage. Entrepris avant la baisse des eaux, il eût été plus fructueux ; il n’a pourtant pas été sans résultats, et pose des jalons pour l’avenir.

Quelques mois après nous le complétâmes, M. Serval et moi, en faisant la reconnaissance des routes qui partent d’un des affluents du Gabon, le Ramboé, et le mettent en communication directe avec le haut Ogo-Wai, à travers des forêts magnifiques où habitent plus de gorilles et d’éléphants que d’êtres humains. C’était une course de vingt-cinq lieues environ à faire par des sentiers difficiles, sur les bords desquels des abris établis en permanence indiquent une circulation habituelle. Nous avons pu constater en effet qu’il existe par cette voie des relations commerciales entre les deux fleuves, et il serait sans doute possible d’activer ce courant au profit de notre établissement du Gabon. Fatigué par une grave maladie que j’avais éprouvée peu de temps auparavant, je ne pus aller jusqu’à l’Ogo-Wai et fus retenu


N’Gowa et Agueille, de la tribu des Gallois (voy. p. 315). — Dessin de Émile Bayard d’après un croquis de M. Grillon du Bellay.


par la fièvre dans un village bakalais. Mon compagnon l’atteignit à un point plus élevé que celui où nous étions arrivés en pirogue, à soixante-quinze lieues environ de la mer. Là le fleuve avait encore plus d’un kilomètre de largeur. C’est donc réellement un cours d’eau important. Mais d’où vient-il ? C’est une question que résoudra l’avenir.

Si l’on jette les yeux sur une carte d’Afrique dressée d’après les découvertes les plus récentes, on voit qu’il existe dans la partie occidentale une région absolument inconnue qui s’étend depuis le septième parallèle au nord jusqu’au quatrième degré au sud de l’équateur. Sur cette vaste surface doit tomber pendant une partie de l’année une immense quantité d’eau. De quel côté s’écoule-t-elle ? Ce n’est pas au nord vers le lac Tchad, car on peut conclure des explorations de Barth et de Vogel que ce lac ne reçoit pas d’eaux venant d’une région inférieure au septième parallèle. C’est peut-être vers le sud par le Congo ; mais c’est attribuer à ce fleuve et sans aucune preuve une bien grande étendue. Il me paraît donc plus probable qu’il y a là comme dans la partie orientale de cette même zone de grands lacs intérieurs. L’Ogo-way, seul grand fleuve de cette région, est-il leur canal de déversement ? Il est difficile de le savoir. En tout cas, son exploration complète serait intéressante au point de vue géographique, car elle don-