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berg. Les détails de ce voyage ne me sont pas connus. l’expédition suédoise a étudié principalement le nord du Spitzberg, savoir le détroit de Van Hinlopen qui le sépare de la terre du nord-est, l’extrémité septentrionale de cette même terre du nord-est et la chaîne d’îlots qui s’avance vers le pôle. Nous profiterons des travaux accomplis par les membres de cette commission, MM. Nordenskiöld, Malmgrén, Chydenius, Blomstrand, Dunér et Torell, mais la relation du voyage, interrompue par la mort prématurée du docteur Chydenius, n’a pas encore paru. Cependant un grand nombre de résultats ont déjà été publiés en suédois et dans les communications géographiques de Petermann. Nordenskiöld a fait connaître les déterminations astronomiques faites au nord du Spitzberg, sur la terre du nord-est et dans les Sept-Îles. Le même, avec le concours de Blomstrand, a donné une carte géologique de cette portion de l’archipel. Les observations magnétiques sont dues à Chydenius, le même a jalonné les points qui pourraient servir à la mesure d’un arc du méridien, qui compris entre 79° 8′ et 80° 50′, serait de la plus haute importance pour la détermination plus exacte de l’aplatissement du globe terrestre. Malmgrén a donné la liste des mammifères, des oiseaux et des plantes du Spitzberg, et Torell un aperçu général sur la géographie physique des régions arctiques. Nous terminons ici l’exposé succinct des principales explorations du Spitzberg pour passer à la description de ce pays.


Climat du Spitzberg.

Quand on songe qu’au Spitzberg la hauteur du soleil ne dépasse jamais 37 degrés, même dans les parties les plus méridionales, que ses rayons obliques, traversant une épaisseur énorme d’atmosphère, n’arrivent à la terre qu’après avoir perdu presque toute leur chaleur, et rasent, pour ainsi dire, la surface du sol, au lieu de le frapper perpendiculairement, comme dans les pays chauds ; si l’on ajoute que du 26 octobre au 16 février l’astre ne se montre plus, et qu’une nuit de quatre mois enveloppe cette terre glacée ; si l’on réfléchit que dans la période de 128 jours, pendant laquelle la nuit alterne avec la clarté du soleil, celui-ci s’élève à peine au-dessus de l’horizon, on comprendra que le climat du Spitzberg soit des plus rigoureux. La présence continuelle de l’astre, pendant quatre mois de l’année, ne compense pas son absence pendant le même espace de temps, ni l’obliquité de ses rayons ; même pendant les mois de juillet et d’août il est le plus souvent obscurci par des brumes qui s’élèvent de la mer. Jamais le ciel n’est serein pendant une journée tout entière. En outre, des vents violents refroidis par les banquises, ou par les glaciers, viennent à de courts intervalles abaisser la température de l’atmosphère. Néanmoins le climat du Spitzberg est moins froid que celui des parties septentrionales de l’Amérique, situées sous la même latitude, savoir l’extrémité de la baie de Baffin, connue sous le nom de Smith-Sound. C’est dans ces régions que les météorologistes ont placé le pôle du froid de l’hémisphère septentrional, qui ne coïncide nullement avec celui de la terre, mais se trouve, en Amérique, par 98° de longitude occidentale et sous le 78e degré de latitude. Si le climat du Spitzberg est moins rigoureux que celui de ces régions continentales, c’est aussi parce que le Spitzberg est un archipel dont les eaux sont réchauffées par le Gulfstream, grand courant d’eau tiède, qui prend naissance dans le golfe du Mexique, traverse l’Atlantique et vient expirer dans la mer Blanche et sur les côtes occidentales du Spitzberg. Aussi celles-ci sont-elles toujours libres en été, tandis que les côtes orientales, bloquées par des glaces flottantes, sont rarement accessibles aux pêcheurs de phoques et de morses, qui seuls fréquentent ces parages désolés.

Je ne fatiguerai pas le lecteur des méthodes que j’ai employées et des calculs que j’ai faits pour exprimer en chiffres les températures moyennes du Spitzberg. J’ai utilisé les observations de Phipps, celles de Parry, de Scoresby, et celles de la commission scientifique du Nord au Spitzberg et en Laponie. Mes résultats étant sensiblement d’accord avec ceux que Scoresby a déduits de ses propres observations, les nombres obtenus méritent la confiance des savants. Comme lui, j’ai calculé les températures pour la partie moyenne de l’île située sous le 78e degré de latitude. Le tableau suivant présente les températures moyennes de chaque mois exprimées en degrés centigrades. Afin que le lecteur puisse se faire une juste idée de la rigueur de ce climat, je mets en regard les températures correspondantes pour Paris, calculées par M. Renou, et basées sur quarante-cinq ans d’observations (1816 à 1860), faites à l’Observatoire de Paris.


Températures moyennes mensuelles au Sptitzberg sous le 78e degré de latitude et à Paris sous 48° 50′.
SPITZBERG PARIS SPITZBERG PARIS
Janvier −18°,2 2°,3 Juillet 2°,8 18°,7
Février −17,1 3,9 Août 1,4 18,5
Mars −15,6 6,3 Septembre −2,5 15,5
Avril −9,9 10,0 Octobre −8,5 11,2
Mai −5,3 13,8 Novembre −14,5 6,6
Juin −0,3 17,3 Décembre −15,0 3,5


La moyenne de l’année est donc de −8°,6, celle de Paris étant de +10°,6 : différence, 19 degrés.

Les températures moyennes ne sont pas seules intéressantes pour bien caractériser un climat, car la même moyenne peut correspondre à des extrêmes très-différents. Voici quelques températures extrêmes, observées au Spitzberg, du mois d’avril à celui d’août. En avril, Scoresby n’a pas vu le thermomètre en mer s’élever au-dessus de −1°,1. En mai, la plus haute température fut de +1°,1. Six fois seulement le thermomètre s’éleva au-dessus du point de congélation. Le mois de mai est donc encore un mois d’hiver. En juin, le mercure dépasse souvent le zéro de l’échelle thermométrique, et Scoresby l’a vu marquer 5°,6, mais en 1810