Page:Le Tour du monde - 13.djvu/24

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les plus reculés, s’approvisionner d’eau à grands frais et non sans peine. Il paraît que sous la domination romaine on avait construit des aqueducs qui conduisaient à l’intérieur de la ville de l’eau de source. Mais le système à l’aide duquel on pourvut dans le moyen âge à cette nécessité, est encore plus admirable, plus grandiose dans son genre et surtout plus singulier. Profitant de la porosité du tuf sur lequel est bâtie la ville, les Siennois creusèrent de longues galeries où s’écoule par filtration l’eau de pluie ; ces galeries, descendant des collines environnantes, traversent la ville en tous sens et y forment comme un immense réseau souterrain. L’origine de ces galeries, qu’à Sienne on appelle bottini, remonte au douzième siècle. Si je ne craignais de réveiller la susceptibilité des commentateurs de la Divine comédie (légion trop nombreuse et surtout trop batailleuse), j’ajouterais que c’est eut-être ce travail d’excavation, poursuivi avec tant d’ardeur et de persévérance, qui donna naissance au bruit dérisoire répandu du temps de Dante[1], que les Siennois trouaient la montagne dans l’intention de rencontrer la rivière Diana au-dessous de leur ville. Toujours est-il que, s’ils ne trouvèrent pas une rivière impossible, ils recueillirent assez d’eau pour alimenter non-seulement les quatorze fontaines de la ville et trois cent cinquante-cinq puits particuliers, mais encore les quatre fontaines des faubourgs.

La chapelle, sur la place du Camp. — Dessin de H. Catenacci d’après une photographie.

Ces bottini ont une longueur totale de vingt-quatre

  1. … quella gente vana
    Che spera in Talamone, e perderagli
    Più di speranza che a cercar Dïana.

          Purg., chant XIII.

    « Ces gens légers (les Siennois), qui placent leur espoir dans Talamone (un port qu’ils avaient dans les Maremmes) ; mais leur espoir sera encore plus déçu que lorsqu’ils cherchaient la Diana. »