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Une Égaritea du Haut-Amazone (voy. p. 91).


VOYAGE DE L’OCÉAN PACIFIQUE À L’OCÉAN ATLANTIQUE,

À TRAVERS L’AMÉRIQUE DU SUD.


PAR M. PAUL MARCOY[1].


1848-1860. — TEXTE ET DESSINS[2] INÉDITS.




PÉROU.


ONZIÈME ÉTAPE.

DE NAUTA À TABATINGA.


L’auteur se voit adopté par une famille inconnue. — Portraits à la plume, d’un père, d’une mère et d’un fils. — Un gouverneur hideux, facétieux et compromettant. — Étude plastique, ethnologique et statistique du village de Nauta et de ses habitants. — Pêche et dissection d’un dauphin d’eau douce. — Le voyageur perd en une nuit le fruit de son travail. — Une Egaritea. — Dissertation sur les Indiens Cocamas. — Traité de linguistique et de musique à l’usage d’iceux. — Le village d’Omaguas et ses habitants. — Iquitos et sa population.

Tandis que j’accomplissais cette formalité, Julio roulait ma moustiquaire, la plaçait sous son bras comme un parapluie, ordonnait à ses hommes de décharger l’embarcation et, les laissant à la besogne, m’invitait à le suivre. Je gravis, derrière lui, la berge à pente douce qui conduit au village. Nous nous arrêtâmes devant une chaumière d’extérieur assez confortable ; un long auvent, soutenu par des pieux, abritait sa façade ; un homme, vêtu de blanc et fumant une pipe, se promenait à l’ombre de cette colonnade. Julio l’aborda familièrement, s’enquit de sa santé et de celle de sa famille, et, retirant d’un sachet de peau, pendu à son cou comme un scapulaire, une lettre un peu crassie par la sueur, il la remit à cet individu qui s’empressa de la décacheter. Pendant qu’il la lisait, je pus l’examiner tout à mon aise. C’était un homme d’environ cinquante ans, de petite taille, de complexion sèche et de tempérament bilieux. Il avait le teint olivâtre ; la face barbue, les cheveux crépus, le front bas et étroit, le crâne fuyant, les mâchoires proéminentes et les dents longues ; en somme, il me parut fort laid.

Sa lecture achevée, cet inconnu fit un pas vers moi, ôta sa pipe de sa bouche et, m’ayant souhaité la bienvenue dans l’idiome de Camoëns, me pria de disposer librement de son logis, de sa personne et de son temps. Comme un pareil accueil m’étonnait assez pour que je regardasse niaisement l’individu, au lieu de le remercier

  1. Suite. Voy. t. VI, p. 81, 97, 241, 251, 213 ; t. VII, p. 225, 241, 257, 213, 289 ; t. VIII, p. 97, 113, 129 ; t. IX, p. 129, 145, 161, 177, 193, 209 ; t. X, p. 129, 145, 161, 177 ; t. XI, p. 161 177, 193, 209. 225 ; t. XII, p. 161, 177, 193 et 209.
  2. Les dessins qui accompagnent le texte de M. Marcoy ont été exécutés d’après ses albums et sous ses yeux par M. Riou.