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Pseudo-bouches de la rivière des Purus : Vue des canaux Camara et Aru.

est d’à peu près soixante mètres, son eau blanche et vaseuse, son lit jonché de pierres et son courant rapide ; les Brésiliens ont remonté ce dernier tributaire du Purus, ayant chaque soir le soleil couchant devant eux. Après cinq jours d’une navigation lente et pénible, comme leurs embarcations s’endommageaient au contact des roches, ils se sont décidés à rebrousser chemin. En rentrant dans le Purus, ils ont appris par les Sehuacus, que les sources du Pahuini, voisines de la Sierra espagnole, étaient habitées par les Indiens Canamaris, qui touchent dans le sud aux Tuyneris et aux Huatchipayris des vallées péruviennes de Paucartampu, et dans le nord aux Pucapacuris avec lesquels nous avons fait connaissance en descendant le Santa Ana-Uyacali et relevant l’embouchure du Mapacho ou Camisia, un de ses affluents de droite.

Dans ce voyage sur la rivière des Purus, les Brésiliens ont dépensé cent quatre-vingt-quinze jours, laps de temps qui pourrait sembler fabuleux, si déjà nous n’avions dit, à propos d’une excursion de ce genre dans l’intérieur du Jurua, de quelle façon musarde et nonchalante, ils remontent le cours de l’Amazone et de ses affluents. Ces cent quatre-vingt quinze jours, en adoptant la moyenne de trois lieues par journée, donnent le chiffre exorbitant de cinq cent quatre-vingt-cinq lieues. Mais si nous retranchons un tiers de ce produit pour les courbes de la rivière, — et celles du Purus sont aussi nombreuses que variées, — nous n’aurons plus qu”un chiffre de trois cent quatre-vingt-dix lieues, soit, bien près de 14° pour la distance parcourue.

De cette étude hydrographique de la rivière des Purus, commencée par la promenade que nous avons faite à travers ses canaux, et terminée par l’exploration de son cours par les Brésiliens, ressortent en manière de conclusion deux découvertes importantes. La première, c’est que la susdite rivière n’a qu’une seule et unique embouchure au lieu de plusieurs bouches que les voyageurs lui ont données ; la seconde, c’est que le système de ces messieurs, qui fait du Purus et de la Madre de Dios ou Amaru-Mayo des vallées de Paucartampu une seule et même rivière de sa source à son confluent, est erroné et, comme tel, doit être signalé à l’attention des professeurs de géographie ayant charge d’élèves.

Toutefois, comme nous ne détruisons pas pour le seul plaisir de détruire, et que nous comprenons jusqu’à certain point la douleur des voyageurs et des savants contraints de divorcer du jour au lendemain avec de vieilles illusions qui leur étaient chères, nous offrons charitablement de substituer à leur système hydrographique, vicieux de tous points, un nouveau système qui, plus sûrement que l’ancien, aura cet avantage prôné par eux, de rattacher d’une façon directe l’empire du Bré-