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Page:Le Tour du monde - 15.djvu/336

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en finir avec les grandeurs officielles de la capitale, nous voulûmes encore nous faire une idée de ce que l’on appelle le Daïmio-Kootsi, ou demeure des princes.

Ce n’est point, comme on pourrait le croire d’après ce titre plus ou moins usurpé, le siége par excellence de la noblesse de l’empire. Ni les grands noms féodaux du Japon, ceux des princes de Kanga, de Shendaï, de Salsouma, ni même les noms des familles taïkounales ne se rencontrent parmi les habitants du Daïmio-Kootsi. Ce quartier est exclusivement occupé par les hommes d’État et les principaux fonctionnaires de l’empereur temporel. C’est donc, à proprement parler, le quartier du gouvernement.


Partie du palais de Satsouma. — Dessin de Thérond d’après une aquarelle de M. Roussin.

Il s’étend au nord-est et à l’est du palais du Taïkoun, dans l’enceinte même de la citadelle, et communique avec Sourougats par cinq ponts, munis de portes fortifiées ; mais il ne nous fut permis de franchir aucun de ces passages : l’un est exclusivement réservé au Taïkoun ; l’autre au Stotsbaschi, et ainsi de suite, jusqu’à un sixième, attenant au quartier de la Cité, par lequel nous pûmes enfin pénétrer dans la zone privilégiée.

Elle contient une trentaine de palais armoriés et un grand nombre d’édifices publics du même style d’architecture, tels que la résidence officielle du Stotsbaschi ; l’hôtel du premier ministre, qui était alors Ogasawara Dsouzio no Kami ; l’hôtel de ville, siége du préfet de Yédo, le Kitamatsi-bounio, personnage dont l’influence auprès du souverain égale parfois celle

d’un ministre favori ; l’hôtel de l’architecte du Taïkoun, l’homme qui occupe à la cour la position la plus enviée après celle du préfet de Yédo ; le palais de justice, avec ses lugubres dépendances, les prisons, les salles de torture, la cour des exécutions secrètes ; les magasins des pompes à incendie ; les greniers à riz ; les magasins de nattes du Castel. Tout cet ensemble de résidences et de bâtiments à l’usage de l’administration supérieure du Japon porte une empreinte de simplicité et de sévérité que l’on ne rencontre en aucun autre pays.

Il faut ajouter qu’il n’y a dans tout le Daïmio-Kootsi ni maisons bourgeoises, ni demeures d’employés subalternes, ni temples, ni bonzeries, ni maisons de thé, ni théâtres, ni écoles quelconques.

Les jeunes gens qui se destinent à la carrière administrative reçoivent cependant une forte éducation, à la fois classique et moderne, civile et militaire. Ils apprennent le métier des armes dans les colléges du quartier de Sourougats ; ils font leur littérature chinoise, et leurs études de langues et de sciences européennes dans les salles universitaires du temple de Seïtô, consacré à Confucius, et situé sur les bords du canal qui, longeant la partie septentrionale de Sourougats, relie la rivière de Tamorüké au fleuve de l’Ogawa.

A. Humbert.

(La suite à une autre livraison.)