Aller au contenu

Page:Le Tour du monde - 15.djvu/424

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

que deux obstacles tout à fait insurmontables : l’un, au cap Yakan, autour duquel la glace est toujours amoncelée, et que Béring essaya en vain de franchir ; l’autre, au cap Severo Vostokhnoï.

Les efforts pour rompre la ceinture au-dessus de laquelle on s’attendait à trouver une mer libre jusqu’au pôle ont été très-nombreux, et ils ont été dirigés sur toutes les ouvertures que les mers de la zone tempérée présentent dans la direction du pôle. L’histoire de ces diverses tentatives n’est qu’une longue suite d’insuccès, si l’on n’y voit que ce seul objet d’arriver au pôle. Cook, et tous ceux qui sont venus après lui, n’ont pu trouver la glace assez ouverte pour leur permettre de pousser au Nord, en partant du détroit de Béring, de même que Hudson et ses successeurs en attaquant la mer du Spitzberg. Tous les efforts dirigés par la baie de Baffin ont également échoué. Les tentatives les plus persévérantes pour traverser la ceinture de glace ont été faites a l’ouest du Spitzberg, et c’est là aussi que les navires se sont le plus approchés du but. La plus haute latitude bien constatée qu’aucun navigateur ait atteinte, est celle de Scoresby, qui arriva au 81° degré 30’, bien que l’on ait prétendu, mais sans preuves suffisantes, que Hudson est allé encore plus loin.

« N’ayant pu trouver de passage à travers la glace, les explorateurs ont essayé de s’y frayer un chemin au moyen de traîneaux. Ce moyen a été surtout employé par les Russes, et parmi ceux de leurs officiers qui se sont surtout distingués dans ces tentatives il faut citer l’amiral de Wrangel, alors jeune et simple lieutenant de la marine russe, et dont les explorations, poursuivies durant plusieurs années, ont montré que dans toutes les saisons la mer se trouve dans les mêmes conditions. Les voyageurs furent invariablement arrêtés par la fin des glaces, et l’existence d’une mer libre au dessus des îles de la Nouvelle-Sibérie est restée un fait établi d’une manière absolument indubitable. »

« Sir Edward Parry essaya la même méthotle au-dessus du Spitzberg, emportant avec lui des bateaux pour le cas où la glace viendrait à lui manquer. Il s’avança au Nord jusqu’à ce que la glace, rompue par la saison avancée, le ramena forcément vers le sud, et le contraignit de renoncer à son entreprise. Vint ensuite celle du capitaine Inglefield par le Smith Sound, puis celle du docteur Kane ; puis enfin est venue la mienne… »

Nous citerons encore ce que M. Hayes dit de la température polaire ; le passage est emprunté à un mémoire de M. Hickson :

« On a toujours supposé que le pourtour immédiat des deux pôles devait être la partie la plus froide de chacun des deux hémisphères, parce que ce sont les points les plus éloignés de l’équateur. De là cet argument que plus haute est la latitude, plus grands doivent être les difficultés et les dangers de la navigation. Une opinion tout à fait opposée avait néanmoins commencé à prévaloir chez les météorologistes après la publication, en 1817, du système isothermal d’Alexandre de Humboldt, qui montra que la température n’est pas réglée par la distance à l’équateur, attendu que la ligne équinoxiale n’est pas un parallèle de chaleur maxima. La ligne de la plus grande chaleur coupe, en Afrique, le méridien de Greenwich à 15 degrés au nord de l’équateur, et s’élève, vers l’est, à 5 degrés plus haut, longeant le bord méridional du désert de Sahara. En 1821, sir David Brewster montra, dans un mémoire sur la température du globe, la probabilité que le thermomètre dût se tenir à 10 degrés plus haut aux pôles que dans certaines parties du cercle arctique. On n’a pas découvert depuis lors de faits nouveaux qui aillent contre cette conclusion, et il en est beaucoup, au contraire, qui tendent à la confirmer. »

Au milieu de ces discussions physiques, il faut admirer le courage des hommes dévoués qui ne craignent pas, pour contribuer à l’avancement de la science, d’affronter les souffrances et les périls de ces affreux climats.

Vivien de Saint-Martin.


FIN DU QUINZIÈME VOLUME.