Elles inspirent un sentiment de profonde solitude,
elles font croire à l’inaltérable paix que l’homme rêve
toujours. On a longtemps gravi pour les atteindre, on
a franchi des gorges, des pentes escarpées : il semble
qu’on a mis un rempart entre soi et les tribulations de
la vie. Les plantes des zones supérieures éveillent la
curiosité, flattent les regards. Dès les premiers pas
j’observe et j’admire une pulmonaire du plus beau carmin,
substitué par la nature à la nuance rose pâle qui
est sa couleur dans les plaines, des bancs entiers de
véronique, au feuillage si délicat, aux fleurs d’un bleu
si tendre, la stellaire aux blancs pétales élégamment
irradiés, l’orchis aux girandoles violettes. Le myosotis
abonde partout. Une mousse grenat veloute les rochers
de son magnifique tissu, épinglé de baies vertes, portées
sur un mince pédoncule. Le torrent, qui ne s’emporte
Église de Notre-Dame de Bon-Conseil, à Lautenbach. — Dessin de Stroobant d’après nature.
plus, a repris ses allures ordinaires et son récitatif habituel.
Le tussilage blanc-de-neige commence à en pavoiser
les bords ; la renoncule âcre les orne çà et là et
orne aussi les îlots de ses touffes splendides, où luttent
d’éclat ses belles feuilles lustrées, spacieuses, délicates,
presque diaphanes, et ses corolles d’or, aux anthères de
même couleur.
La vallée de Gottschlœg a le plus frappante similitude avec la Mer-de-Glace : la glace et la neige sont absentes, mais la forme est presque identique. Le bassin de la Forêt-Noire se termine également par une abside, à laquelle s’embranche, sur la droite, une gorge tournante. Mais au lieu d’une lugubre perspective, elle forme un attrayant spectacle. Ne vous imaginez point que ces hautes terres soient désolées, inhabitées ; des chalets épars, de vertes prairies, des bestiaux qui pâturent, des champs cultivés, des bois majestueux en font, au contraire, une vivante églogue. Les adolescents,