nable. Le lendemain, la couche glacée était devenue si
profonde, que l’on me dissuade de continuer ma route
à pied. L’hôte m’assura que je me mettrais en péril si
je voulais traverser le Kniebis sans autre guide que ma
carte, et sans pouvoir espérer de secours s’il m’arrivait
malheur. Je pris donc un traîneau pour franchir les
passages les plus rudes, et, quelques minutes après, je
vis les maisons blanches et noires s’effacer derrière moi.
Les grelots du cheval, le bruit de la neige froissée par
le véhicule résonnaient dans l’immensité du désert. Pas
un croassement, pas une plainte, pas un rayon de soleil,
mais une atmosphère brumeuse sur des hauteurs livides ;
Place du marché, à Schaffhouse. — Dessin de Stroobant d’après nature.
çà et là des masses de rochers, dont les formes
se dessinaient à peine, comme celles d’un cadavre sous
les plis du drap mortuaire ; puis, sur toutes les crêtes,
sur toutes les pentes, dans tous les abîmes, des forêts
glacées, blanches, roides, immobiles, pareilles à la
végétation d’une planète hyperboréenne. Le moindre
vent, qui balançait les rameaux, leur donnait une physionomie
plus singulière encore. La neige glissait de
branche en branche, d’étage en étage ; chaque flèche
pyramidale semblait une cascade, et l’on aurait cru voir
des millions de fontaines ruisselantes.
(La suite à la prochaine livraison.)