Aller au contenu

Page:Le Tour du monde - 17.djvu/145

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Esquimaux épiant un phoque. — Dessin de A. de Neuville d’après le capitaine F. Hall (Life with the Esquimaux’)'.


VOYAGE À LA MER LIBRE DU PÔLE ARCTIQUE,


PAR LE DOCTEUR J. J. HAYES, CHIRURGIEN DE LA MARINE DES ÉTATS-UNIS[1].


1860-1862. — TRADUCTION ET DESSINS INÉDITS.


Séparateur



L’aube du printemps. — Ma colonie d’Esquimaux. — La famille de Hans. — Occupations. — Chasse aux morses. — Combat avec ces animaux. — Mort et funérailles de Kablunet.

Les préparatifs de mon voyage vers le Nord occupaient tous mes instants. Le soleil avait paru le 18 février ; le lendemain son disque s’éleva tout à fait au-dessus de l’horizon ; il monta un peu plus haut le jour suivant et ainsi de suite jusqu’à ce que nous eussions plusieurs heures de pleine lumière avant et après midi. On ne voyait pas encore le soleil au-dessus des collines méridionales du port, mais la lugubre nuit s’en allait et chaque jour nous apportait plus de clarté ; l’aube du printemps s’évanouissait dans le jour de l’été comme le crépuscule de l’automne s’était perdu dans les ténèbres de l’hiver.

Les chiens que Hans m’avait ramenés étaient parfaitement rétablis, et ne paraissaient plus se ressentir de leurs souffrances. Quant à la meute de Kalutunah, elle se maintenait, ainsi que son maître, dans un état prospère à Etah. C’est là qu’était le gros de ma colonie d’Esquimaux, tandis que les parents de Hans, Tcheitchenguak, son beau-père, Kablunet, sa belle mère, et Angeit, son jeune beau-frère, habitaient avec lui la hutte qu’il s’était construite à côté du vaisseau.

Kablunet, la vieille matrone, sut se rendre fort utile. Très-adroite de ses mains, elle travailla sans relâche jusqu’à ce que son aiguille lui eût gagné tous les petits objets dont elle avait besoin ; elle nous confectionna des surtouts et des bottes et nombre d’autres vêtements de peaux. Son teint était fort clair, comme l’indique le nom de Kablunet, — l’enfant à la peau, blanche, — sous lequel les Esquimaux désignent notre race, et si celui de Tcheitchenguak ne signifie pas l’enfant à la peau noire, il a certes grand tort, car notre nouvel ami était de nuance plus que foncée.

L’extérieur de cet aimable couple n’était pas fort séduisant. Ils avaient la figure large, de lourdes mâchoires,

  1. Suite et fin. — Voy. p. 113 et 129.