VOYAGE DANS LE LAZISTAN ET L’ARMENIE.
PAR M. THÉOPHILE DEYROLLE[1].
Un jour, on me présenta une médaille trouvée dans
une grotte. Les gens du village assuraient qu’un chrétien
venu de Trébizonde, quelques années auparavant,
avait emporté de ce lieu des trésors. On y voyait
aussi, me disait-on, des inscriptions curieuses. Je ne
pouvais donc me dispenser d’aller visiter cette grotte,
quoiqu’elle fût située assez loin.
En arrivant, je fus d’abord assez désappointé en voyant que les inscriptions qu’on m’avait promises ne consistaient qu’en quelques croix ou signes sans valeur tracés au charbon. J’avançai ensuite : à l’aide d’une bougie, je pénétrai dans une salle longue et étroite, éclairée faiblement par la lumière de l’entrée. Dans un coin, j’aperçus un trou où je m’engageai en me traînant à plat ventre, ce qui me conduisit à une autre chambre dont l’odeur fétide faillit me suffoquer. Le sol était entièrement recouvert du fumier de petits animaux. Je visitai soigneusement la base des parois de la grotte, espérant y trouver des coléoptères aveugles, mais ce fut sans succès. Pendant que je procédais à ces recherches, j’entendis autour de moi de petits cris, et, et l’endroit où la voûte était le plus élevée au-dessus de ma tête, je fus enveloppé par un tourbillon de chauves-souris qui venaient me battre le visage de leurs ailes ; elles éteignirent ma bougie. Dans l’obscurité je n’eus d’autre moyen de défense que de faire le moulinet avec une badine que par bonheur je tenais à la main ; le bruit mat de mes coups répétés sur les chéiroptères me donna l’espoir d’en être bientôt débarrassé, et en effet peu à peu ils finirent par gagner la première salle et, de là, les champs.
Après le combat, je rallumai ma bougie et ramassai mes victimes, une vingtaine de chauves-souris ; je reconnus qu’elles étaient de deux espèces.
Je continuai mon exploration. Dans une cavité étroite et sans issue m’attendait un curieux spectacle. Tout autour de moi les pierres étaient couvertes de petits cristaux jaunes, rouges et verts, qui brillaient de mille feux ; j’en pris quelques échantillons.
1 Suite. – Voy. p. 1.