lément français, par sa supériorité numérique sur les autres nationalités, par les grandes institutions qu’il a fondées, et par la présence d’assemblées politiques où il domine, se sent véritablement chez lui et imprime son caractère à tout ce qui l’entoure. Cependant, il faut l’avouer, l’absence prolongée de toutes relations commerciales avec la France donne aux grands magasins, même à ceux qui appartiennent à des Canadiens, un caractère presque exclusivement anglais. Dans les relations de famille, dans les tribunaux, dans la politique, le français reste à peu près maître du terrain. On n’en pourrait pas dire autant du théâtre : le clergé canadien est peu favorable à notre répertoire, bien que nos œuvres tragiques ou comiques fassent le tour du monde, et nos pièces, si brillamment représentées chaque année à la Nouvelle-Orléans, ne le sont qu’à de rares intervalles dans les grandes villes du Canada. Est-ce un bien ? est-ce un mal ?
Au reste, il faut bien se le dire, si au Canada nous retrouvons la France, ce n’est point la France telle que nous l’avons laissée de l’autre côté de l’Océan. Un auteur anglais, M. Russell, l’a dit avec raison : « C’est plutôt une France du vieux temps où régnait le drapeau blanc fleurdelisé… » Et c’est, en effet, une remarque que ne tarde pas à faire le voyageur, si peu qu’il soit doué du sens de l’observation : au Canada, tout ce qui est français, ou peu s’en faut, semble remonter au dix-septième siècle ; tout ce qui est moderne porte l’empreinte britannique ou américaine. Il