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La Malbaie (voy. p. 102). — Dessin de Taylor, d’après une photographie.


EXCURSION AU CANADA ET À LA RIVIÈRE ROUGE DU NORD,

PAR M. H. DE LAMOTHE.
1873. — TEXTE ET DESSINS INÉDITS.




I

La ligne Allan. — Le Moravian. — Passagers et émigrants français. — La baie de Londonderry. — Le détroit de Belle-Isle. — Les glaces flottantes. — L’entrée du Saint-Laurent. — Anticosti. — Les Acadiens et les pêcheries. — L’estuaire du Saint-Laurent. — Les milices canadiennes.


De toutes les lignes de bateaux à vapeur qui franchissent l’Océan entre l’Europe et l’Amérique, il n’en est point dont l’itinéraire offre au touriste autant d’attraits que celui de la ligne Allan, entre Liverpool et Québec. Les administrateurs de cette ligne essentiellement canadienne profitent de la belle saison pour faire passer leurs magnifiques vapeurs au nord de l’île de Terre-Neuve, ce qui réduit à trois mille kilomètres environ la traversée en pleine mer. Les douze cents derniers kilomètres se font en vue des côtes et dans des eaux relativement tranquilles[1].

Quelle porte d’entrée d’ailleurs, quelle splendide avenue pour pénétrer au cœur du Nouveau-Monde, que la voie maritime et fluviale qui commence au détroit de Belle-Isle, au milieu des glaces flottantes détachées de la mer de Baffin, et se termine à Québec, après cent cinquante lieues de navigation dans le magnifique estuaire du Saint-Laurent ! Combien il doit paraître prosaïque et mesquin, lorsqu’on pouvait contempler cet admirable panorama, de débarquer purement et simplement, après neuf ou dix jours entre le ciel et l’eau, sur l’un des quais boueux de l’Impérial City, la grande mais peu pittoresque New-York !

C’est le 17 juillet 1873 que je m’embarquai à Liverpool, sur le Moravian, de la compagnie Allan, à destination de Québec.

Le personnel français des premières classes se composait de quatre voyageurs, moi compris.

D’abord, un Canadien de Montréal tout fraîchement sorti du collège, et que sa famille venait d’envoyer, pour ses débuts dans la vie, visiter Londres, Paris, Rome, le Caire et Bombay.

Le second de mes compagnons, également Canadien, était le Frère visiteur des écoles chrétiennes de la province de Québec, excellent homme et fort agréable causeur.

Le troisième, homme de quarante ans, autrefois directeur de haras en Autriche, allait au Canada pour

  1. En hiver seulement, lorsque le Saint-Laurent est fermé par les glaces, les paquebots canadiens changent leur itinéraire et débarquement à Portland, ville de l’État du Maine que le chemin de fer du Grand-Tronc relie directement à Québec et à Montréal.