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Page:Le Vavasseur - Églogues, Lemerre, 1888.djvu/129

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Laissant chez soi l’enfant et la femme et l’aïeul,
            Tu vas au loin, tout seul… tout seul,
Mais, bercé par les flots, tu gardes tes chimères ;

            Tu ne vois pas vieillir les mères,



Les pères décliner et les femmes souffrir,
            Les enfants languir et mourir
Et souvent bien longtemps tu caresses en rêve
            Céux que l’on pleure sur la grève.

Du pays d’outremer quand tu reviens chez toi
            On t’enguirlande comme un Roi,
C’est fête ; en attendant que le flot te remporte
            La misère reste à la porte.

Ton retour rajeunit les aïeux fatigués,
            Ta femme et tes enfants sont gais,
Le souci domestique est noyé dans la joie
            Et c’est sur toi qu’on s’apitoye.

Certes, j’ai l’âme tendre et mon cœur est de chair ;
            Du foyer qui m’est cher
Je goûte la chaleur et la douce coutume,
            Mais j’en sens aui l’amertume.