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fortunez. Entreprise II.

si j’aime ſeulement vne beauté mortelle,
Quand elle paſſera, mon amour deffaudra,
Mais mon cœur eſt eſpris de la forme eternelle,
Qui m’allume d’vn feu qui point ne s’eſteindra.
Or ma belle c’eſt vous qui eſtes ma conduite
A ſi braues deſſeins, oit ie vai m’eſleuant,
Si vous m’attribuez vn peu voſtre merite,
Vous me verrez encores auancer plus auant.
Uoilà comment par vous ma fortune eſt heureuſe,
Auſſi rien ne m’eſt beau quand ie ne vous voi pas,
De meſme mon amour vous rendra glorieuſe,
Car mon cœur eſt ſi grand, qu’il n’aime riē de bas.

Le lendemain que tout fut preſt, les Fortunez prirent congé de la Royne qui leur ordonna vn conuoy magnifique. Ainſi ils partirent emportās beaucoup de ſignes de bonne volonté de tous ceux du pays. Or eſt il que la Royne auoit à chacun fait vn beau preſent, mais à part elle auoit dōné à Viuarambe vne bague de ſept anneaux qui ſe ioignoient par vn tel artifice, qu’ils n’eſtoient que vn, ayant ſept chas, en chacun deſquels eſtoit vne pierre vnique en valeur, &differente de toutes les autres, & chacun des anneaux pouuoit eſtre ſe paré : & luy il luy donna vn colier fait de quatre pierres Hermetiques ſupportees de criſtal, œuure admirable & tellement recherché d’ouurage, qu’il peut eſtre dit le Seul, il l’auoit eu de ſa bonne ſœur Olocliree, la Royne luy iura de ne le laiſſer iamais : auſſi elle le portera auec ſon amour autant que ſa vie, & le Fortuné touſiours accompagné de ſon anneau pluſieurs vn, le tiendra autant cheremēt que ſon ame, laquelle ne ſe pouuant biē conſoler qu’auec ſa Royne, ſe coula