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Le uoyage des Princes


L’Empereur les pria d’employer toute leur induſtrie pour ſon ſoulagement, & ils le conſolerent, l’aſſeurans de prouuoir ſi bien à ſon affaire, qu’il en auroit du contentement : Et afin de donner luſtre à leur bel artifice, ils demanderent ſecours de temps pour conſulter enſemble, de ce qu’ils deuoyent faire, ce qu’il leur accorda, non ſans ſ’eſtre reſerué la liberté de les enquerir ſouuent, ſi ſes affaires amoureuſes viendroient à fruits de lieſſe : Leur conſeil eſtoit tout pris, & ne reſtoit qu’à l’effectuer : Ce qu’attendant & ſe refraiſchiſſant ces beaux eſprits frequentoient la Fontaine, que Fonſteland viſitoit de bon cœur, pour y voir ſa maiſtreſſe, à quoy ſes freres l’aſſiſtoyent comme tous trois mutuellement ſ’exerçoyent à l’auancement de leurs fortunes : Eſtans à la fontaine auec la Fee qui cōduiſoit les chaſtes amours, de Lofnis & de Fonſteland, chacun prenoit à ſon gré parti de recreation, & ce chaſte amant ſe ſeruant du temps opportun, rendoit à ſa Dame cōte de ce qu’il auoit eſté abſent d’elle, & de quelles meditations ſon cœur ſ’eſtoit repeu, n’ayant pour obiet en la memoire que ſes perfections : Et ainſi glorieux de ſon preſent contentement lui baiſoit ſes belles mains qu’elle retiroit par feinte, le repouſſant mignonnement vers la bouche aymant aymee, l’humble paſſionné luy deduiſoit ſes actions eſcoulees, & elle luy diſoit : A ceſte heure que vous auez faict preuue de l’abſence, ie vous prie de me dire comment vous eſtiez, à ce que par la cognoiſſance de voſtre eſtat ie iuge du mien : car s’il eſt ainſi que ie le veux croire, que vous ayez de l’affection pour