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Le uoyage des Princes


aux geſtes de l’Empereur, dont l’apparēce eſtoit paree de feinte, à quoy ne prenant pas effet leur prudence fut deceuë. L’heure venue de l’aſſignation, l’Empereur ne faillit à ce qu’auoit tramé la Fee, & vid ce qu’elle luy auoit declaré, qui luy donna entiere aſſeurance de ſon dire, telle que des lors ſon cœur fut du tout aliené des Fortunez. A l’heure dite, Lofnis entretenoit ſon humble Fonſteland, qui tout content de ceſte pudique faueur, recueilloit de ſes yeux la douce vie qui l’animoit. La deſloyale Epinoyſe y eſtoit, mais elle ſ’eſtoit tapie ſous le relays de la muraille, ſi que l’Empereur ne vid que ſa fille auec le Fortuné, qui deuiſoyent en ſe pourmenant vis à vis d’où eſtoit la Fee, laquelle ſouuent les auoit fait rencontrer en ce contentement en ſa preſence, autrement Lofnis iamais n’y eut conſenti : L’Empereur tout preſque hors de ſoy reueint en ſa chambre, tant accablé de penſees qu’il n’eſtoit que confuſion, & ſurtout pour vn propos qu’il auoit ouy, & qu’Epinoyſe auoit induſtrieuſement dreſſé. Car ordinairement en leurs recreatiōs ils auoyent des ſujets ſerieux, & ce iour auoit eſté, qu’ils diſputeroyent de l’eſtat des Empires, qui ſelon qu’ils concluoyent me dependoyent que du hazard, qu’ils appartenoyent à ceux qui les pouuoyent auoir, ils diſcouroyent en ſe promenant ſi pres de la Fee, qu’elle les oyoit bien auſſi, & qui ſouuent aux autres fois, diſoit ſon opinion : mais pour ce coup elle faiſoit ſemblant de les admirer, & d’attendre à dire ſa penſee ſur la reſolution qu’ils en feroyent. Or l’Empereur reprenant ſes