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fortunez. Entreprise I.


ſur mon ame, en la fidelité que ie vous doy, que ie ſuis innocente, hors-mis en ce que ie vous vié de deſcouurir & confeſſer de la grace permiſe à ce gentilhomme, en quoy ie n’ay rien commis qui puiſſe troubler les moindres de vos penſees ou affaires. L’Empereur eſcoutoit ſa fille, & conſideroit attentiuement la figure de verité, qui perſiſtoit conſtante, dont il ſe trouua en vne perplexité aſſez difficile, & ruminoit les troubles de sō entendement auec des fantaſies tant ineſgales, que preſque ſa reſolution s’eſcouloit. En ceſte neceſſité pour ne paroiſtre defailly de grandeur & de cōſeil, car il cognoiſſoit l’eſprit de ſa fille, il luy dit, Vous deuiez auoir plus d’eſgard à voſtre rang, & ne falloit pas vous rendre ſi familiere à des eſtranges. A cauſe de la iuſtice ie ne me puis retracter, vne autrefois ie vous oyray pour m’aſſeurer de la verité de vos paroles. Le temps, voſtre conſtance, & ma bonne fortune ameneront tout au point certain : Et afin que ie vous donne eſpoir de mieux & courage de m’en declarer d’auantage, ie ne vous renuoyeray pas en la Tour determinee, mais en celle du hault iardin de plaiſance. Ie vous commande d’y demeurer, vous defendant d’en ſortir ſans mon congé, ie ne vous donneray garde que voſtre propre innocence, ſi vous l’auez, & l’obeiſſance que vous me deuez, ie ne veux pas meſmes que vous deſcendiez au iardin, demeurez en la Tour, & au hault faictes y vos gentilleſſes, ayez là voſtre cabinet & petits meubles de plaiſir, & qu’il n’y ayt que la iardiniere qui aille à vous : ie veux bien que vous choiſiſſiez deux de vos filles, les plus propres à vous ſeruir &