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fortunez. Entreprise II.


ie deſire exceller, & voudrois eſtre capable de le pouuoir demonſtrer ; car mon deſir eſt plus grand que mon pouuoir. Et combien que ie cognoiſſe mon defaut, & que ie manque d’art, de ſcience, & d’adreſſe, ie m’auentureray & par voſtre commandement, ie ſouſpireray vn hymne qu’Amour m’a dicté en l’hōneur de la Belle qui peut ſur tous cœurs. Si c’eſt vne verité que ie repreſente, elle le recognoiſtra. Si c’eſt vn beau deſſein imaginé à l’auanture, elle n’en aura point de deſplaiſir, pour autant que ce qui eſt faict pour l’vnique Belle, luy plaira touſiours.

Esprits qui recherchez ce qui eſt deſirable,
N’allez plus retraçāt pour trouuer d’autre obiet,
Car tout ce que le ciel a conceu d’admirable,
Se trouue vniquement en mon diuin ſujet.
De ce qu’on dit Amour, on ne ſauroit rien croire,
Que l’ayant icy veu, dans ſon pourtrait dhōneur :
Les yeux ne ſont point yeux, ſ’ils n’ont eu ceſte gloire,
D’auoir peu l’adorant, voir icy leur bon-heur,
Toutes les raretez precieuſes au monde,
Sont en ce beau treſor de la perfection,
Ce chef d’œuure accompli qui de graces abonde
A de toute beauté toute proportion.
Ceux qui tiennent d’Amour, & luy doiuēt hōmage,
Voyent en ces beautez de l’amour le pouuoir,
Car ma Belle eſt d’amour & le temple & l’image,
Où les parfaits amans doiuent tout leur deuoir.
Sa façon de grandeur, tant douce & tant altiere,
Monſtre qu’vn bel eſprit gouuerne ſes beautez
Et que l’honneur eſtant de ſon cœur la lumiere,


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