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Le uoyage des Princes


en la preſence de tout le peuple, & le coula au fonds de la mer, ce qu’elle a depuis continué iournellement au dommage de quelqu’vn, de quoy le peuple ſe trouua fort eſtonné, chacun craignant ceſte rencontre, car meſmes la main s’eſtan teſleuee haut, s’eſlançoit ésiardins, courts, & autres lieux où il y auoit des perſonnes, & en attrapoit. La Royne, les ſages & le vulgaire mirent tout ſoin, diligence, & peine, de remedier à ce dan ger : mais ce fut en vain, les coups de canon, les armes offenſiuesy eſtoient employees, mais pour neant, rien ne ſe trouua capable pour reſiſter à cet inconuenient, ny fort § pour l’abattre : l’af fliction en duroit touſiours. Les Sages, les Philo ſophes & toutes ſortes de gens qui ſe cognoiſſent à tout, y ont eſté employez, mais ce qu’ils y ont taſché n’y a peu profiter : à la fin la prudente Roy ne, qui eſtoitl’vnique entre les Dames accom plies, s’aduiſa du Miroir, ſe perſuadant qu’il au roit quelque efficace, & en l’aſſemblee du Con ſeil, où les Sages eſtoient, propoſa ce qu’elle en auoit premedité, qui fut trouué fort à propos, ſi que dés l’heure il fut eſſayé en ſa preſence, & de tous les Princes, & du peuple. Le Miroir doncques preſenté à la main, on vid vn effet merueilleux, car incontinant comme par hu milité elle s’enclina, ainſi que ſi elle ſe fuſt plon. gee de ſon long en la mer, puis ayant eſté vn peu nageant ſur les ondes, elle ſe releua & remit en on eſtat accouſtumé. Tout le monde fut eſ meu de ce geſte : On oſta le miroir puis on le repreſenta, mais ſans fruict : tellement qu’on delibera d’attendre, & aduint qu’à l’heure cou-