moyselle auoit, fort pris garde aux Fortunés, croyant qu’ils eſtoiēt ceux dont elle auoit autre fois ouy parler, cela fut cauſe que ſi librement elle parle auec Vivarābe, lequel à l’heure deſiree fit partie auec ſes freres d’aller voir ce marchād, pour deſcouurir qui eſtoit ceſte belle, Ils vindrēt donques aux lieux où elle eſtoit, & le marchand les mena en ſa chambre où ils virent ceſte belle comme vn eſclair brillant au commencement des tenebres : Il eſt à croire que ſi leurs cœurs euſſent eſté libres, il n’y euſt pas eu moyen de ſ’echapper des flammes excitees par ces beaux yeux : Eſtans entrez ils trouerent ſur la table des inſtruments de muſique, & demāderent qui ſ’en aydoit, la Belle dit que c’eſtoit elle qui en faiſoit meſtier, & que ſ’ils deſiroient en auoir le plaiſir que tout incontinent elle leur en donneroit le paſſetēps : c’eſtoit leur preparer ce qu’ils demandoient : parquoy auſſi toſt ils ſ’y entremirēt auec elle, luy diſans qu’ils y prenoyent plaiſir, & l’accompagneroyent : Elle dit quelques airs puis les prie que tous enſemble ils chantaſſent & touchaſſent des inſtrumens, ce qui fut galemment executé, & ainſi ils paſſerent quelque heure & comme les Fortunez laiſſoient les inſtruments qu’ils auoyent touchez, elle leur dit que pour les remercier elle leur vouloit donner vn air tout nouueau, de paroles & de muſique, pour ceſt effect elle prit ſon lut & de ſa voix image de la douceur qui plus contēte l’oreille, accompaigna les accens de ce ſouſpir auec vne grace eſgale à la perfection.