Page:Le Voyage des princes fortunez - Beroalde, 1610.pdf/661

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
618
Le uoyage des Princes

Et telle vous l’auez diſcretement choiſie,
Afin de m’exercer à la fidelité.
Le beau iaune de paillé & la couleur mignonne
A l’vnique beauté queſeule ie sognoy,
Selon ſon iugement de mes deſſeins i’ordonne,
Son vouloir eſt le mien, ſon plaiſir eſt ma loy.
Ceſſez autres conleurs vous n’auez point de grace
Madame a remarqué ce qui eſt plus parfait,
Auſſi comme en beaatétoute autre elle ſurpaſſe,
Sa couleurplus que vous a d’eſclat & d’attrait.
Ces diuerſes couleurs que les Dames choiſiſſent,
Ne ſont que des eſclairs paſſans ſoudainement,
Et les opinions auſſi viſteperiſſent
Que leſymbole en eſt eſleu legerement.
Toute couleurperit, & par le temps s’efface,
Fors le iaune paillé qui ne s’eſteint iamais,
Toutes autres couleurspaſſent ſans efficace,
Mais ceſte-cy touſiours eſt brillante en effaits.
Plus on preſſe la paille en differens vſages,
Plus on void ſa couleur au deffaut reſiſter,
Auſſi recognoiſt-on que les canſtans courages,
Surmontent tous efforts pour conſtans perſiſter.
Tous fruits ſoigneuſement auec le temps meuriſſent,
S’auançans ſur la paille, en leur perfection,
Ainſi les beaux deſſeins à la fin s’acompliſſent
La conſtance guidant la belle intention.
Comme ceſte couleur eſt conſtante & certaine,
La conſtance ſera mon eternel obiet,
Et ma vertuſera non comme couleur vaine,
Mais vn fixe accident conioint à ſon ſuiet.
Bien que la paille enfin par trop de temps vieilliſſe,
Sa couleur toutesfois iamais ne vieillira,
Auſſi pour la maiſtreſſe à qui ie fai ſeruice.