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Le uoyage des Princes


ce, qu’il ſemble que la verité & vos paroles ſe planchent ſur vn meſme ær. A dire vray vous me preſentez des offres bien recherchees, mais

Celà eſt ordinaire à ces accortes ames,
De ſe ſçauoir ayder de leurs inuentions,
Et feindre à leurplaiſir des paſſageres flames,
Pour ſonder ce qui eſt de nos conceptions.
Ainſi vou vou iouez de vos belles idees.
Ainſi vous voletez ſur l’eſle des plaiſirs,
Mais les Dames qui ſont par la vertu guidees,
Cognoiſſent par la fin, la fin de vos deſirs.
On conte toutesfois que les ames touchees
De veritables traicts, ne peuuent s’exprimer,
Et que celles qui ſont moins d’amour empeſchees,
Diſent mille fois mieux la paſſion d’aimer.
C’eſt comme il faut paſſer les momens inutiles,
C’eſt comme il faut leurrer les eſprits ignorans,
Aux diſcours on cognoit les langues plus habiles,
Et aux effets on voit les courages galands.

Gelase. Ie me fay tant fort de la bonté de mon cœur, & de voſtre bel eſprit, que ce que, vous auez maintenant profetiſé, n’eſt pas à bon eſcient pour mon regard, auſſi celà eſtant comme on le prendroit, à l’aparence, vous me feriez tort, & à vous qui auez tant de iugement que vous liſez és ames : Et tant de courage que ie ne daignerois m’occuper que pour vn ſuiet de merite & de vertu : car i’ay l’ame trop digne pour la vouloir prophaner à des obiets inutiles. Et puis vn cœur qui s’eſt addonné à la recherche de ce qui le vaut, ſçait bien s’expliquer, & ie vous veux repartir par ce peu, attendant le plus