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Page:Le Voyage des princes fortunez - Beroalde, 1610.pdf/741

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Le uoyage des Princes


ble, d’autant que durant ceſte rude debte, on n’eſt point à ſoy, & n’eſtant point à ſoy, on ne peut dignement ordonner de ſes belles imaginatiōs. Eſtāt quitte, au cōtraire on n’a affaire qu’à ſes propres penſees, qui inſtalēt l’eſprit au ſouuerain bien, le rendāt cōtant : & n’y a nul contēt, que celui qui ſe ſatisfait en ſes particulieres fantaiſies, reglees par raiſon, ſelon laquelle on a iouiſſance de ſes amours. Or l’amour eſt vne émotion, qui comprent les deſirs de tout objet ſouhaitable, parquoy celui qui iouit de l’objet, deſiré en ſon eſprit tel qu’il ſoit, iouit de ſes amours, & en ceſte iouyſſance, il ſent ſon eſprit libre & quitte de mauuaiſes craintes, & faſcheux deſtours, & en telle latitude de cœur, il peut rendre à chaqu’vn ce qu’il ſemble deuoir à cauſe de la bien-ſeance, & ce ſans ennuyeuſe contrainte. Ainſi il eſt libre, n’ayant rien au cœur qui l’inquiete, ioint que la parfaite liberté eſt au repos de conſcience. L’emperevr. Ie vous prie, Pere Sarmedoxe, ne paſſez point plus auant en ceſte ſpeculation, qui me remettroit en memoire mes deffaux, car par l’intelligence que i’en conçoy, ie iuge combien ie ſuis loin du but de l’excellence auquel ie pretens. Acheuons ce qui eſt bien commencé, afin que ie puiſſe iouïr de mes amours, eſtant quitte & libre. Paſſons vers ces autres Dames, qui ſ’amuſent à vn beau ſuiet. En ceſte humeur, prenant congé d’Olocliree, il fit paroiſtre qu’il auoit relaſché de ſa melancholie, auſſi ſe ſentoit-il poinçonné de quelques flames meſlees d’eſperance, lesquelles l’alumerent encor plus viues, par l’ob-