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Page:Le Voyage des princes fortunez - Beroalde, 1610.pdf/746

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Fortunez. Entreprise III


de vous comme ie fay, encores autant que de ma vie, & vous ſans confiderer le trauail de mon ame, auez volagement trauerſé où il vous a pleu, oubliant ce qui vous eſtoit acquis : le iour vous a t-il peu voir, ſans que vous ayez eu quelque eſlancement de deſplaiſir ? Ne vous eſtes vous point ſouuenu que ie vous ay eſcrit, & que ie vous priois de me mander que ſignifioit, que fermant ma lettre, le feu de la laque m’auoit attinte au doigt, & que ce ſigne eſtoit plus vif que vos diſcours ? Si vous eſtiés autant accompli en amours qu’en autres vertus, vous excelleriés ſur tous : Mais ie croy que vous auez laiſſé eſcouler toute affection, pour ne penſer plus en celle que vous diſiez eſtre cauſe de voſtre deſir de viure, laquelle ne vit qu’en vous aymant. Cavaliree. Ma dame, vous qui eſtes l’vnique vie de ma vie, pourriés vous auoir la perſuaſion au cœur, telle que le propos en la bouche ? Ie ſens bien que vous faites de grandes & notables accuſations contre moy, entremeſlant le miel de vos douceurs de pointes cruellement viues me repreſentant trop de belles conceptions, que vous auez à mon ſuiet & en m’aſſeurant que voſtre eſprit en eſt occupé me manifeſtez vn cœur parfaictemët vni, à l’obiect qu’il ſ’eſt propoſé d’afectionner, dilatant vos penſees ſur le reciproque amour que ie vous doy vous debattés auec moy ayant pris les armes que i’auois eſleués, pour vous mōſtrer par vn combat de courtoiſie quelle eſt mon amitié ; vous m’aués preuenu en la douce reproche, que ie penſois vous faire de ce dont vous m’accuſez, & par ainſi vous me tanſez à propos, me remonſtrant mon