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Page:Le Voyage des princes fortunez - Beroalde, 1610.pdf/95

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Le uoyage des Princes


ne penſoit qu’à ceſte gloire de plaiſir, luy donnoit toutes ſortes d’hōneſtes libertez. Or comme l’âge no° forme, & qu’auec beaucoup de vertus no° deſirōs en accumuler d’autres : la belle ayāt volōté de paſſer d’vne perfection en l’autre, eut voulu tout embraſſer, & entreprēdre pour ſe parfaire, & encore y eſtoit plus ſtimulee par vne genereuſe emulation qui la poinçonnoit, quand elle oyoit parler de quelque autre qui euſt des perfections : en l’ardeur de ce plaiſir elle receuoit ſous l’adueu du Roy toutes ſortes de doctes & de curieux, qu’elle oyoit volontiers diſcourir ſelon leurs humeurs : car l’vn diſoit les accidens de quelque auanture amoureuſe, l’autre contoit de certaines parties terminees ou non accomplies : Tel mettoit en auant des ſecrets trouuez sās en reſoudre, quelqu’vn en diſputoit plus pertinemment, mais elle preſtoit l’oreille plus attentiuement à ceux qui mettoient les ſciences en ſuiet de propos, & ſurtout quand ſelon l’heure & occaſion on luy bailloit quelque de monſtration dont elle peuſt enfler ſon vertueux magaſin. Son cœur qui voloit apres la reputation, & qui luy faiſoit cognoiſtre qu’elle n’eſtoit point tant eſloignee de merite, qu’elle ne peuſt forcer doucemēt quelque grand courage à l’amour, dont elle eſtoit capable, luy fit propoſer en ſoy-meſme qu’elle ne ſe laiſſeroit iamais vaincre à ceſte paſſion, que pour vn ſuiet qui excellaſt en merites. En ceſte pēſee elle proteſta ſur ſon ame de ne permettre iamais à aucun de l’aymer, qui ne fuſt eſloigné de tous appetits vulgaires, & ne ſurpaſſaſt tout autre en perfection d’auis & de dexterité. En ceſte reſolutiō elle ouyt parler de ce grād Empereur qui