Page:Le dragon blesse Croisset Francis 1936.djvu/116

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dénicher les curios. C’est pour mieux éblouir leurs invités que les épouses de diplomates, de banquiers, d’industriels, rêvant de l’occasion unique, fouillent, matinales, les quartiers des jades, des cristaux, des soieries, accompagnées du « connaisseur ».

Il existe plusieurs espèces de « connaisseurs » : le connaisseur appointé, le connaisseur qui est de mèche, le connaisseur artiste, bénévole et désintéressé et le connaisseur mondain — un peu inquiétant.

Cette course aux curios fait partie de la vie élégante de Pékin. Si Mme X… a déniché l’occasion « unique », aussitôt, de salon à salon, le potin se propage : où l’a-t-elle découvert ? Combien l’a-t-elle payé ? Qui l’a conseillée ? Gare au « connaisseur » qui, dévoué plus spécialement aux fouilles d’une de ces dames, lui a fait une infidélité en conseillant une rivale ! Le point d’honneur s’en mêle. Car la gloire d’avoir découvert le précieux objet inédit ne rejaillit pas sur le connaisseur. Sa carrière, pour rémunératrice qu’elle puisse être, est ingrate. On ne dit jamais : tel connaisseur a du flair, mais toujours : combien Mme X… a de goût !