Page:Le dragon blesse Croisset Francis 1936.djvu/117

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Sans compter que ce bibelot tant convoité constitue, en ces temps de crise, un excellent placement et que, rapporté en Amérique ou en Europe, il vaut souvent Plus de vingt fois le prix payé à Pékin. À moins qu’il ne soit ni ancien, ni même authentique, ce qui en Chine n’a point du tout la même signification. Chaque amateur, en effet, qui achète un bibelot « d’époque » s’imagine que son antiquité suffit à le rendre authentique. Candeur européenne ou américaine ! Hélas ! plus la poterie ou la porcelaine sont vénérables, moins elles ont de chance d’être absolument « vraies ».

C’est qu’en Chine il n’y a pas de « faux », ou plutôt l’on n’applique pas là-bas au terme « faux » le sens occidental et péjoratif que nous lui attachons. Un faux, en Chine, est un arrangement, presque un progrès. Il suppose une idée d’embellissement, de perfection. Lorsqu’un ouvrier d’art ajoute trois pattes à un chameau millénaire et unijambiste, une tête à un guerrier rann décapité, un bras à une Kwanin krang-si, il ne se rend pas coupable d’une supercherie. En rétablissant ce bibelot dans son intégrité, il lui paie le pieux tribut