Page:Le dragon blesse Croisset Francis 1936.djvu/129

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bordé de tombeaux. Humbles, ils ne s’indiquent que par une pierre et souvent même par l’absence de culture : en Chine, là où il n’y a rien, il y a les morts. Parfois, un arc de pierre ou de bois polychrome marque la tombe d’une épouse irréprochable. De cette terre que le printemps fleurit et où pourrissent des animaux et des hommes souvent à peine recouverts monte, mêlée à d’exquis parfums, une atroce odeur de cadavre.

La route s’arrête devant un gué, reprend sous forme de piste, traverse un pont vermoulu. Puis c’est un village sordide mais Odieusement émaillé de devises. Devant Un restaurant exigu, des vieillards d’ivoire me contemplent, indolents, tandis qu’un enfant nu au ventre bouddhique pisse sur Un chien crevé.

En principe, il ne faut que trois quarts d’heure pour se rendre en auto à Pao-Ma-Chang. En fait, l’on ne sait jamais : il y a tant d’encombrements ! Voici une file de chameaux, une caravane venue de Mongolie. L’un derrière l’autre et le cou balancé ils passent, effilochés et dédaigneux, se détachant de profil contre de rondes montagnes lointaines que l’air lim-