nisera une armée, organisera des réseaux, fera surgir une flotte, mais il battra les barbares sur leur propre terrain : il fabriquera des montres « suisses » qui coûteront moins cher et marcheront aussi bien, tissera des cotonnades qu’il vendra à bas prix, ruinera des industries européennes en fournissant à meilleur compte des bicyclettes, des jouets, des chapeaux, des vêtements, des conserves, des appareils de précision, des souliers, des bijoux, écrasant les maisons rivales des deux continents malgré les frais de transport et les droits de douane des nations épouvantées.
Tout cela qui est le produit de notre civilisation, il l’assimile sans s’en imprégner. Il devient l’une des puissances les plus authentiques de notre monde moderne et n’absorbe en rien notre civilisation. Il reste lui-même, exactement lui-même, à ce point immuable qu’un Japonais de vingt ans, costumé en complet veston, qui dans un dancing boit un cocktail, juché sur un tabouret de bar, est le même qui, demain peut-être, devant l’autel de ses ancêtres, vêtu d’une robe hiératique, s’ouvrira le ventre d’un coup de sabre, si l’exigent la fidélité, l’honneur ou la patrie.