Page:Le dragon blesse Croisset Francis 1936.djvu/33

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crasseux et du boulevard, l’auto stoppe.

Chaque rue a son commerce ou son métier : la rue des Bijoutiers, des Menuisiers, la rue des Soieries, la rue des Jades : des splendeurs dans d’infâmes écrins.

— C’est là que nous dînerons ce soir, dit Durec en me montrant une ruelle. Bariolée d’enseignes, elle s’allonge, sordide et magnifique.

Assise à la porte d’une boutique, une grosse ama, en sarong et dont les pantalons laissent voir les pieds nus, se relève pour débarrasser de l’objet qu’elle vient d’acheter sa jeune maîtresse dont un fourreau moderne moule jusqu’au cou le corps mince et dont la jupe fendue s’ouvre à mi-cuisse.

Une dame passe en chaise : droite dans sa robe à ramages, son visage de porcelaine coiffé d’une nocturne chevelure huilée, elle a l’air, dans son immobilité balancée, d’une petite statue Krang-Si juchée sur un socle peu sûr. Elle détourne les yeux en nous voyant, avec une jolie grimace de mépris.

— La ruelle là-bas, à votre gauche, me renseigne Durec, est la rue des Serpents. Je ne vous ferai pas la blague de vous y