Page:Le dragon blesse Croisset Francis 1936.djvu/34

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mener ce soir, à moins que vous ne teniez essentiellement à manger du cobra. Canton est l’endroit de Chine où l’on accommode avec le plus d’art les choses les plus immangeables.

Je me promène dans Canton avec un étudiant chinois.

Encore que prévenu par M. Abel Bonnard dont le livre sur la Chine est devenu mon livre de chevet, je suis atterré. Tout ce pourquoi j’aimais à l’avance cette terre de poètes, de peintres, d’architectes, de sculpteurs est attaqué par ceux-là mêmes qui en ont la garde.

Les derniers sanctuaires, profanés, servent à des garages, à des restaurants, à des boutiques. Un temple a été épargné comme inutilisable : on a résolu de le démolir. Le hasard me fait assister au premier coup de pioche qui, aux applaudissements d’une foule primaire, fait voler les écailles de plâtre rose d’un merveilleux dragon du xive siècle. Des fresques vertes, fraise et jonquille, représentant des oiseaux et des fleurs, sont saccagées au nom du progrès. Un Bouddha d’une matière commune,